Royaume de France
481, 843 ou 987 – septembre 1792
avril 1814 – mars 1815
juillet 1815 – février 1848
Drapeau du royaume de France à partir de la Restauration en 1814. |
Les Armes de France à partir des années 1370. |
Le royaume de France à la veille de la Révolution, en 1789.
Statut | Monarchie fédérative (Ve siècle-VIIIe siècle) Monarchie féodale (VIIIe siècle-XIVe siècle) Monarchie absolue (XVe siècle-1791) Monarchie constitutionnelle (1791-1792 et 1814-1848) |
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Capitale | Paris |
Langue | Latin (jusqu'en 1539) Français (à partir de 1539) |
Religion | Catholicisme |
Monnaie | Livre française (781-1792) Franc français (1814-1848) |
496 | Baptême de Clovis Ier à Reims. |
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751 | Pépin le Bref est le premier Carolingien élu roi des Francs. |
800-843 | Le royaume se fond dans l'Empire carolingien. |
987 | Hugues Capet est élu roi et fonde la dynastie capétienne. |
1337-1453 | Guerre de Cent Ans qui se termine par une victoire française. |
1562-1598 | Guerres de religion dont la signature de l'édit de Nantes permet de mettre un terme. |
1661 | Louis XIV transforme le régime en monarchie absolue. |
1789-1792 | Début de la révolution française qui mène à l'abolition de la royauté. |
1815-1848 | La Restauration et monarchie de Juillet sont les derniers régimes monarchiques français. |
(1e) 481-511 | Clovis Ier |
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(1e) 843-877 | Charles II le Chauve |
(1e) 987-996 | Hugues Capet |
(De) 1830-1848 | Louis-Philippe Ier |
Entités précédentes :
- Empire romain d'Occident (481)
- Empire carolingien (843)
- Francie occidentale (987)
- Premier Empire français (1814)
- Empire français (Cent-Jours) (1815)
Entités suivantes :
- Première République française (1792)
- Empire français (Cent-Jours) (1815)
- Deuxième République française (1848)
Le royaume de France est l'entité politique de la France de sa création à 1792, puis de 1814 à 1848. Selon les historiens, la date de cette création varie, allant de l'avènement de Clovis en 481, du partage de l'Empire carolingien en 843, ou lors de l'élection d'Hugues Capet en 987.
Après Clovis, il existe plusieurs royaumes francs qui forment une entité commune. Avec les Carolingiens, la fédération monarchique se mue en monarchie féodale et s'étend fortement jusqu'à devenir un Empire qui éclate en 843. La Francie occidentale devient l'héritière du royaume des Francs, mais connaît une très forte décentralisation qui limite les pouvoirs du roi aux alentours de Paris, les autres grands seigneurs n'étant liés au roi que par un serment de fidélité. Les Capétiens, dont le premier est Hugues Capet, vont jusqu'à la fin du Moyen Âge, rattacher les grandes principautés à leur domaine personnel et mettre fin à la féodalité. Les pouvoirs du monarque ne vont qu'augmenter au détriment de la noblesse jusqu'à Louis XIV qui devient monarque absolu. Avec la Révolution, les pouvoirs du roi sont encadrés par une Constitution et la France devient une monarchie constitutionnelle. Aboli en , le Royaume de France est rétabli en 1814, brièvement interrompu par le retour au pouvoir de Napoléon Ier, et est finalement définitivement remplacé par la République en 1848.
Le roi est le chef du royaume et le père de ses sujets, sa volonté fait loi, mais il est aidé dans sa tâche par de nombreux conseils et une administration qui se développent et se complexifient au fur et à mesure. Son pouvoir est aussi limité, d'abord par les seigneurs locaux au Moyen Âge, puis une fois la noblesse mise au pas, par les juges des Parlements. Il doit en outre respecter les lois fondamentales du royaume qu'il s'engage de maintenir par serment lors de son sacre. La société, très hiérarchisée, comprend les trois ordres de la noblesse, du clergé et du tiers état, eux-mêmes hiérarchisés en ordres secondaires et en corps, bénéficiant tous de privilèges.
Histoire[]
Royaume des Francs (481-843)[]
Des origines à Clovis[]
Les Francs sont un peuple installé aux confins de la Gaule du Nord. Ils servent l'Empire romain d'Occident comme mercenaires et se romanisent assez rapidement. Ils obtiennent le statut de peuple fédéré, mais ne parviennent pas à s'unir et éclatent en plusieurs petits royaumes[1]. Plusieurs rois probablement légendaires se succèdent, dont Mérovée, fondateur de la dynastie des Mérovingiens. Le premier roi dont l'existence est certaine est Childéric Ier qui règne sur un petit royaume autour de Tournai[2].
Cinq ans après l'effondrement de l'Empire romain d'Occident, Clovis hérite en 481 d'un royaume plus petit que les autres royaumes barbares[3]. En 486, il bat Syagrius à la bataille de Soissons et étend ses territoires[4]. En 496, il bat les Alamans à Tolbiac et se fait baptiser à Reims[5]. Il peut désormais se présenter comme le libérateur des peuples chrétiens de Gaule, alors sous domination de barbares qui pratiquent l'arianisme[1]. En 507, il défait les Wisigoths lors de la bataille de Vouillé, ce qui lui permet de s'étendre dans le sud de la Gaule[6]. En 509, il est élu roi de tous les Francs[1].
Un royaume pour plusieurs rois[]
Clovis Ier meurt en 511, son royaume est partagé entre ses quatre fils. Chacun hérite d'une partie du royaume et prend le titre de « roi des Francs ». Néanmoins, ce partage ne fait pas disparaitre l'idée d'un ensemble uni, le « Royaume des Francs »[7]. Ce dernier est divisé en trois grandes régions : l'Austrasie, la Burgondie et la Neustrie, dont les frontière évoluent au gré des guerres et des héritages. Plusieurs rois parviennent à réunir l'ensemble, mais dès la mort du souverain il est divisé entre ses descendants[8]. Les Francs s'étendent à l'est aux dépens notamment du Royaume alaman ou encore de la Bavière[9].
Les Pépinides[]
En 639, une crise éclate, permettant à l'aristocratie de renforcer sa puissance, en particulier, ceux qui occupent le poste de maire du palais récupèrent le pouvoir réel[10]. La famille qui occupe cette charge, les Pépinides, s'impose. L'un de ses membres, Charles Martel, se constitue une clientèle en distribuant des bénéfices à ses fidèles[11] et remporte plusieurs succès militaires dont la bataille de Poitiers qui met un terme à l'extension musulmane en Europe de l'Ouest[12]. En 737, le dernier roi mérovingien meurt dans l'indifférence générale[13]. Après une période de vacance du pouvoir, Pépin le Bref est élu roi des Francs en 751 grâce au soutien de l'Église qui souhaite un souverain fort. Il est aussi le premier roi des francs à être sacré, pour montrer que son pouvoir vient de Dieu. Il sacre aussi ses fils pour établir un caractère héréditaire[14]. En 755, il triomphe des Lombards et permet la fondation des États pontificaux[15] et la décennie suivante il chasse les musulmans de Septimanie[16]. Il impose plusieurs réformes, religieuses comme la dîme, et politiques comme le monopole de la création monétaire pour la monarchie[17]. À sa mort, le royaume est partagé entre ses deux fils[18], puis le futur Charlemagne règne seul après la mort de son frère[19]. Ce dernier agrandit son royaume en annexant notamment la Bavière et mène une guerre sainte contre les Saxons païens[20]. Il organise l'administration de ses territoires et installe sa capitale à Aix-la-Chapelle[21].
Sous l'Empire carolingien[]
Lors du Noël de l'an 800, Charlemagne est couronné empereur d'Occident par le pape. Devenu le plus grand souverain chrétien d'Occident, le pape a besoin du soutien de Charlemagne, alors que l'Empire byzantin connaît une crise interne et n'existe plus aux yeux des chrétiens de l'ouest[21]. Pour affirmer son pouvoir centralisateur, il divise l'Empire, et donc le royaume, en plusieurs centaines de comtés où il nomme un fidèle avec les pouvoirs judiciaires, militaire et de percepteur[22]. Charlemagne meurt en 814 ; son fils Louis le Pieux lui succède à la tête de l'Empire. La question de sa succession pose problème puisque le titre impérial ne peut être divisé[23]. La guerre civile entre les trois fils éclate en 830 et Louis le Pieux abdique avant d'être remis sur le trône par les évêques. Il n'est plus qu'un souverain fantôme jusqu'à sa mort en 840 où Lothaire lui succède. Le 25 juin 841 à la bataille de Fontenoy-en-Puisaye, Charles et Louis battent leur frère Lothaire et l'obligent à diviser l'Empire en trois royaumes avec le traité de Verdun[24].
Période féodale (843-1515)[]
La fin des Carolingiens[]
En 843, Charles le Chauve hérite de la Francie occidentale. En plus de la Francie médiane, Lothaire Ier hérite du titre impérial, mais théoriquement, une fraternité doit être maintenue entre les royaumes[25]. La mort de Lothaire en 855 met fin à cette idée et son domaine est partagé entre ses trois fils[26]. En 869, Charles le Chauve s'empare du domaine de Lothaire II[27], puis de la couronne impériale en 875, mais il n'est pas reconnu par l'ensemble de chrétienté[28]. En 877, il rédige le capitulaire de Quierzy qui réorganise le royaume en permettant aux comtes de transmettre héréditairement leurs charges[29]. Il meurt la même année, ses successeurs sont confrontés à des crises politiques et à des invasions extérieures[30].
Face aux envahisseurs normands et hongrois, les grands seigneurs du royaume appellent l'Empereur à l'aide. Mais celui-ci ne parvient pas à contenir la menace et ils élisent comme roi Eudes, comte de Paris, de la dynastie des Robertiens[31]. La monarchie étant élective, les Carolingiens et les Robertiens se succèdent comme rois pendant plusieurs années. En 936, Louis IV d'Outremer devient roi, son fils et son petit-fils lui succèdent laissant penser à une restauration Carolingienne. Mais en 987, les Grands du royaume élisent le Robertien Hugues Capet, qui règne sur une principauté autour de Paris[32].
Durant cette période, les principautés territoriales émergent. Le roi n'a plus le pouvoir réel et il ne gouverne plus que par l'intermédiaire des princes. Pour organiser la résistance contre les envahisseurs, Charles le Chauve a créé de grands commandements militaires qui regroupent plusieurs comtés confiés à un prince qui possède les pouvoirs administratifs et militaires. Au cours du Xe siècle, le roi perd le contrôle sur ce système et les princes deviennent presque totalement indépendants et transmettent leur charge à leurs descendants[33].
Le début des Capétiens[]
Le 3 juillet 987, Hugues Capet est élu roi des Francs. Il règne sur les princes qui le reconnaissent comme leur suzerain, mais il ne possède aucun pouvoir sur les territoires hormis sur le domaine royal français[34]. Au XIe siècle, les vassaux des princes territoriaux acquièrent aussi une indépendance de fait (sauf dans le duché de Normandie, le comté de Flandres et le comté de Barcelone) et c'est le châtelain qui possède le pouvoir judiciaire et économique réel[35]. Les rois profitent de cette désorganisation pour imposer une transmission héréditaire de la couronne et prennent conscience que leur pouvoir ne dépasse pas les frontières du domaine royal. Le fils ainé est alors associé au pouvoir en étant sacré du vivant de son père[36]. En 1066, le duc de Normandie Guillaume conquiert la couronne d'Angleterre. Il est vassal du roi de France pour les terres continentales, mais indépendant dans son royaume d'Angleterre. S'ouvre alors une rivalité entre l'Empire anglo-normand et le roi[37].
Sous le règne de Louis VI, la vision du royaume commence à changer. Celui-ci mène plusieurs expéditions dans le domaine royal, pour soumettre les châtelains qui ne reconnaissent pas son pouvoir[38] et des expéditions en dehors, signe que les Capétiens commencent à imaginer le royaume comme une unité. Louis VII continue cette politique en épousant Aliénor d'Aquitaine[39]. En dehors des rois, une famille s'impose, celle des Plantagenêt, qui règne sur un territoire immense dont une grande partie dépend du royaume de France. Les Plantagenêt sont alors plus puissants que le roi[40].
Construction de l'idée de royaume[]
En 1180, Philippe II Auguste devient roi. Son idée est d'étendre le domaine royal au détriment des princes[41]. Il commence par obtenir une partie de l'Artois en dot[42]. En 1185, une guerre contre plusieurs de ses vassaux lui permet d'obtenir le comté d'Amiens et une partie du Vermandois[43], ainsi que le comté d'Auvergne[44]. En 1204, il s'empare militairement d'une partie des terres continentales du roi d'Angleterre après avoir utilisé le droit féodal pour prononcer une confiscation, dont le duché de Normandie[45]. Pour reprendre ses terres, Jean d'Angleterre constitue une grande coalition que Philippe Auguste bat lors de la bataille de Bouvines[46]. Il renforce son pouvoir dans le midi, en soutenant la croisade des Albigeois qui combat l'hérésie cathare[47].
Louis VIII ne règne que trois ans, mais parvient à conquérir des fiefs dans le midi[48]. Saint Louis hérite d'une situation compliquée avec des provinces en révolte[49]. Après plusieurs grandes victoires, la situation est rétablie dans les années 1240. Il part en croisade de 1248 à 1254[50]. À son retour, il profite de son prestige pour devenir l'arbitre des conflits diplomatiques français et européens. À l'intérieur du Royaume, cette politique permet de placer la royauté au-dessus des autres princes[51]. Il met aussi en place les bases d'une justice royale où le roi se place dans le rôle de juge et arbitre, notamment contre les abus de l'administration[51].
Philippe III le Hardi devient roi en 1270, il réunit notamment le comté de Toulouse au domaine royal[52]. Il règne désormais sur l'ensemble du royaume où il peut légiférer et appliquer la justice, mais il ne touche des revenus que de son domaine[53]. Philippe IV le Bel fait tout pour augmenter le trésor royal, en réorganisant l'administration[54] et en procédant à des dévaluations monétaires[55]. Il convoque aussi pour la première fois les états généraux pour lever de nouveaux impôts[56]. En 1312, il dissout l'Ordre du Temple auprès duquel il est endetté[57]. La même année, il rattache Lyon au royaume. Son mariage avec Jeanne Ire de Navarre permet l'union des deux royaumes et le rattachement du comté de Champagne au domaine royal[58].
À la mort de Philippe le Bel en 1314, la petite noblesse se révolte contre le pouvoir central, qui s'impose en matière fiscale et judiciaire[59]. Une crise dynastique éclate avec la mort prématurée de Louis X le Hutin en 1316. Un roi sans descendance est une première depuis l'avènement d'Hugues Capet et il est décidé d'exclure de la couronne la fille de Louis X. Les deux autres fils de Philippe le Bel règnent successivement jusqu'en 1328, mais s'éteignent sans héritier. Le plus proche héritier mâle est le roi d'Angleterre par sa mère, mais ce choix est repoussé par une assemblée qui lui préfère Philippe de Valois plutôt que voir le royaume tomber sous la tutelle anglaise[60].
Le temps des crises[]
Avec Philippe VI, une nouvelle dynastie arrive sur le trône, les Valois. En 1337, Philippe VI confisque les terres continentales du roi d'Angleterre pour manque d'obéissance. En réponse, celui-ci revendique la couronne de France[61]. Le conflit débute par plusieurs victoires anglaises, mais l'épidémie de peste noire, qui fait baisser la population, empêche de tirer parti de ses victoires[62]. En 1350, Jean II le Bon est fait prisonnier lors du désastre de Poitiers. Pour être libéré, il est obligé de signer le traité de Brétigny qui l'oblige notamment à accorder l'indépendance aux terres continentales anglaises[63]. Plusieurs révoltes aristocratiques, bourgeoises et paysannes éclatent contre le pouvoir royal[64]. En 1360 est créée une monnaie stable, le franc[65].
Le nouveau roi Charles V lutte contre les compagnies qui ravagent le pays et reconquiert les territoires perdus avec des chefs comme Bertrand Du Guesclin. À sa mort en 1380, les Anglais ne contrôlent plus beaucoup de territoires[66]. Charles VI s'entoure de conseillers pour réformer l'État, les Marmousets[67]. À partir de 1392, le roi est atteint de crises de folie. Une rivalité pour contrôler le gouvernement commence et après plusieurs assassinats, la lutte devient une guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons. Les Anglais s'allient au parti bourguignon et relancent les hostilités en 1413[68] et deux ans plus tard la bataille d'Azincourt mène à la signature du traité de Troyes où le dauphin est déshérité au profit du roi d'Angleterre[69].
En 1422, Charles VI meurt, Henri VI, âgé de neuf mois, est proclamé roi de France et d'Angleterre. Charles VII n'accepte pas ce fait et se proclame aussi roi de France. Le royaume est divisé en trois, les provinces occupées par les Anglais, celles fidèles à Charles VII et les États de Bourgogne[70]. En 1429, une jeune paysanne connue de nos jours sous le nom de Jeanne d'Arc convainc Charles VII d'aller se faire sacrer à Reims, ce qui lui permet d'être légitime pour une grande partie de l'opinion. Elle est finalement brulée par les Anglais en 1431[71]. En 1435, le traité d'Arras réconcilie les Armagnacs et les Bourguignons et met fin à la guerre civile[72]. Charles VII réorganise l'État, en mettant en place la première armée et le premier impôt permanent[73]. En 1449, le duché de Bretagne rejoint le camp français et la Normandie est reconquise. En 1453, les Anglais perdent définitivement l'Aquitaine[74].
De la fin du féodalisme à l'idée d'absolutisme[]
Les Anglais vaincus, le roi s'attaque au duché de Bourgogne et au duché de Bretagne qui sont des États quasi indépendants[75]. En 1465, plusieurs princes s'unissent dans la Ligue du Bien public contre l'accroissement des pouvoirs de Louis XI. Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, mène la fronde, mais le temps n'est plus à l'émiettement du pouvoir et les princes aspirent à un rapprochement avec le roi[76]. Le duc de Bourgogne est retrouvé mort en 1477, ses terres sont partagées entre le roi (qui récupère notamment le duché de Bourgogne et la Picardie)et l'Empereur. Ce partage ouvre une rivalité avec les Habsbourg qui durera jusqu'au XIXe siècle. Charles VIII, devenu roi en 1483, prépare l'union à la Bretagne en mariant son héritier avec la duchesse[77]. Des territoires comme le comté d'Anjou et le comté de Provence sont rattachés à la Couronne, tandis que le comté de Flandre est perdu[78]. Les guerres d'Italie débutent en 1494 pour faire valoir les droits des Valois sur le Royaume de Naples, puis le duché de Milan pour Louis XII devenu roi en 1498[79].
Ancien Régime (1515-1789)[]
L'affirmation du pouvoir central[]
François Ier devient roi en 1515 et remporte la bataille de Marignan qui lui permet de s'emparer de terres en Italie[80]. En 1519, le roi d'Espagne Charles Quint est élu empereur : ses territoires encerclent la France qui, en réponse, s'allie avec l'Empire ottoman[81]. François Ier est fait prisonnier en 1524 : le duché de Bourgogne est livré pour obtenir sa liberté. Mais les États de la province refusent et demandent à rester sujets du roi de France, signe que le roi, malgré la centralisation, ne peut décider de tout[82]. En 1539, il promulgue l'ordonnance de Villers-Cotterêts qui fait notamment du français la langue officielle de l'État[83].
À partir des années 1530, la réforme protestante provoque une crise dans l'Église. La France est touchée et la répression contre les hérétiques s'accentue avec l'avènement d'Henri II[84]. Après la mort de ce dernier en 1559, plusieurs rois se succèdent, tandis qu'une partie de la noblesse se convertit au protestantisme pour défier le pouvoir central. Catherine de Médicis assure la régence, les protestants deviennent un parti dans l'État qui se rassemble autour des Condé et des Châtillon[85]. Pour éviter la guerre civile, plusieurs édits sont promulgués qui autorisent la liberté de culte pour les protestants, mais ils indignent les catholiques fervents[86]. Durant les années 1550, Henri II s'empare de Calais, chassant définitivement les anglais de France[87], et des Trois-Évêchés[88].
Les guerres de religion, opposant catholiques et protestants, débutent en 1562 avec le massacre de Vassy. Les villes tombent dans les mains des deux protagonistes et le chef des catholiques François de Guise est assassiné[89]. Une trêve est signée avec une clause qui prévoit le mariage d'Henri III de Navarre (futur Henri IV) avec la sœur du roi[90]. Il est célébré en 1572, pour l'occasion la noblesse protestante monte à Paris. Quelques jours plus tard, un attentat provoque le massacre de la Saint-Barthélemy, massacre qui se propage dans de nombreuses villes du royaume[91]. Cet événement provoque une rupture des protestants avec la monarchie catholique, ils commencent à s'émanciper dans le Midi en organisant un pouvoir parallèle[92]. Henri III devient roi en 1574 et accorde l'édit de Beaulieu. Les catholiques trouvent les dispositions excessives et forment des ligues qui mènent des opérations militaires[93]. En 1588, une insurrection catholique éclate dans Paris et oblige le roi à se réfugier à Chartres[94]. En réponse, il fait assassiner Henri Ier de Guise, provoque une rupture avec la Ligue[95] et s'allie avec les protestants pour récupérer son trône. Son assassinat en 1589 propulse le chef protestant sur le trône, mais les ligueurs refusent de le reconnaitre. En 1593, Henri IV se convertit au catholicisme et doit combattre jusqu'en 1598 pour conquérir son royaume. Cette même année est signé l'édit de Nantes qui reconnait la liberté de culte aux protestants[96]. Avec la réunions des deux couronnes, les rois portent désormais le titre de roi de France et de Navarre[97].
De la reconstruction à la Fronde[]
Avec Henri IV s'affirme une nouvelle dynastie, les Bourbons. Pour reconstruire le royaume ravagé par plusieurs années de guerre, il met en place une des premières véritables politiques économiques de la France[98]. La colonisation française des Amériques débute avec la fondation de Port-Royal en 1604 et de Québec[99]. Le roi est assassiné en 1610 ; il faut attendre quelques années de régence de Marie de Médicis[100] pour que Louis XIII ait l'âge de régner et s'entoure par la suite de ministres tel que le cardinal de Richelieu[101]. Son père et lui intègrent les fiefs Bourbons à la couronne? comme le comté d'Armagnac, le comté de Foix ou encore le vicomté de Béarn[102].
En 1635, la France s'engage dans la guerre de Trente Ans qui lui permet de s'étendre à l'est avec notamment l'annexion de la Haute-Alsace[103]. Louis XIII meurt en 1643 : son fils n'a que quatre ans et sa mère Anne d'Autriche assure la régence avec le cardinal de Mazarin[104]. En 1648, les parlementaires, inquiets de la montée de l'autorité monarchique et des impôts, tentent un coup de force pour contrôler la monarchie. Une émeute éclate à Paris obligeant la cour à quitter la capitale[105]. Les princes rejoignent la Fronde, alors que les troupes royales partent à la reconquête des provinces révoltées. Les armées des princes sont défaites et en 1652, Louis XIV, déclaré majeur l'année précédente, peut faire son entrée dans Paris[106]. En 1659, le comté de Roussillon et le comté d'Artois sont rattachés au royaume[107].
L'absolutisme royal[]
En 1661, Louis XIV déclare qu'il règne et gouverne seul et réforme la gestion administrative[108]. Jean-Baptiste Colbert devient le principal collaborateur du roi, ensemble ils mènent une politique de soutien aux manufactures, de création de grandes compagnies de commerce, et de soutien aux arts[109]. Marqué par la Fronde, le roi souhaite réduire au silence la noblesse. Pour la surveiller, il fait construire le château de Versailles où il s'installe en 1682. Il met en place une société de cour où les grands seigneurs doivent vivre une grande partie de l'année pour obtenir des faveurs royales[110]. En 1682, la colonisation de l'Amérique s'accélère avec la fondation de la Louisiane[111].
Pour faire face aux guerres, l'armée et la marine royale sont renforcées, Vauban fortifie les villes clés[112]. La France s'impose comme la première puissance du continent par de nombreuses conquêtes militaires comme la Flandre française et la Franche-Comté[113]. En 1685, il révoque l'édit de Nantes : l'élite protestante restante s'exile[114]. Il met en place la politique des Réunions, qui a pour but d'annexer des enclaves comme Strasbourg[115]. Les guerres suivantes sont plus difficiles et Louis XIV doit lutter contre une Europe coalisée lors de la guerre de la Ligue d'Augsbourg et la guerre de succession d'Espagne. Cette dernière permet à son petit-fils d'accéder au trône du royaume d'Espagne s'il renonce à ses prétentions sur celui de France[116], mais elle perd une partie de ses colonies en Nouvelle-France dont l'Acadie[117].
Louis XIV disparait en 1715, son successeur est son arrière-petit-fils Louis XV alors âgé de cinq ans. La régence est assurée par Philippe d'Orléans qui commence par casser le testament du défunt roi qui devait le contrôler dans sa fonction[118]. Des politiques sont menées pour éviter la banqueroute, dont le système de Law qui mène à un désastre économique[119]. La régence prend fin en 1723 et Louis XV nomme André Hercule de Fleury comme principal ministre[120]. Louis XV se lance dans la guerre de Succession de Pologne qui aboutit à la nomination au duché de Lorraine de son beau-père polonais et au fait que le duché vienne à la couronne à la mort du duc[121]. Malgré la victoire française lors de la guerre de Succession d'Autriche, Louis XV ne demande aucun territoire, ce qui provoque des mécontentements dans le royaume[122]. La guerre de Sept Ans sonne le glas des possessions françaises aux Amériques[123].
Louis XVI devient roi en 1774. Rapidement, il rompt avec la politique de son prédécesseur. Il nomme Turgot ministre avec pour mission de réformer l'État. Ce dernier commence par libéraliser la vente des grains, ce qui mène à la guerre des farines et rompt la confiance du peuple envers le roi qui jusqu'ici était vu comme le père nourricier[124]. Pour venger la perte de ses territoires américains, la France soutient les rebelles dans la guerre d'indépendance des États-Unis, mais les frais engagés font replonger le royaume dans les difficultés financières[125].
Monarchies constitutionnelles (1789-1848)[]
Le royaume sous la révolution[]
Pour sortir le pays de la crise financière, le roi fait appel aux États généraux. Ils s'ouvrent en mai 1789, mais le 17 juin 1789, les députés du tiers état se proclament en assemblée nationale et entament un bras de fer avec le roi. Le renvoi de Jacques Necker et la concentration des troupes royales provoquent des troubles. Le 14 juillet 1789, les Parisiens attaquent la Bastille pour y récupérer des armes[126], puis dans les campagnes, c'est la Grande Peur qui oblige les députés à voter le rachat des droits féodaux lors de la nuit du 4 août 1789[127]. En octobre, le roi est ramené à Paris par une foule en colère : il doit désormais loger au palais des Tuileries[128]. L'Assemblée nationale prend une série de mesures pour consolider l'unité nationale, dont l'égalité des droits, l'unification du droit au niveau national, ou encore la création des départements pour rationaliser le découpage administratif[129]. La loi sur la Constitution civile du clergé réorganise l'Église française en faisant des membres du clergé des fonctionnaires[130]. Les enclaves comme le Comtat Venaissin sont rattachées à la France[131].
Se sentant en danger, Louis XVI quitte secrètement Paris pour rejoindre des royalistes à Montmédy, mais il est rattrapé et ramené dans la capitale. Dès lors le lien entre le roi et la population est rompu[132]. La constitution est promulguée en septembre 1791, mettant fin officiellement à la monarchie absolue de droit divin[133]. En avril 1792, l'Assemblée nationale déclare la guerre à l'Autriche, mais les défaites s'enchainent et la France est sur le point d'être envahie[134]. Un manifeste, envoyé par le chef des armées étrangères et menaçant les Parisiens, met le feu aux poudres. Le 10 août 1792, la foule envahit la cour des Tuileries, le roi doit s'abriter à l'Assemblée nationale qui le suspend[135]. Le 21 septembre 1792, le lendemain de la bataille de Valmy, les députés votent l'abolition de la royauté en France : la République succède à la monarchie. Le roi est jugé, condamné à mort et guillotiné le 21 janvier 1793[136].
La Restauration[]
La royauté est rétablie le 6 avril 1814, après la défaite de Napoléon Bonaparte face aux armées européennes coalisées. Le sénat appelle Louis XVIII qui accède à la tête de l'État en accordant une charte qui limite volontairement son pouvoir. Napoléon revient d'exil en mars 1815 et rétablit l'Empire pendant cent jours, tandis que Louis XVIII fuit à Gand[137]. Louis XVIII revient ensuite sur le trône après la défaite de Napoléon à Waterloo. Le roi meurt sans héritier en septembre 1824 ; son frère Charles X lui succède. Il rétablit le sacre, souhaite favoriser la noblesse et s'appuie sur les députés ultraroyalistes qui souhaitent un retour à l'Ancien Régime[138]. En 1830, plusieurs ordonnances pour limiter les libertés publiques comme le rétablissement de la censure pour la presse ou la dissolution de la chambre provoquent des émeutes et l'abdication du roi[139].
La Monarchie de Juillet[]
La Chambre des députés nomme « roi des Français » Louis-Philippe Ier, chef de la branche capétienne cadette des Orléans. Le 9 août 1830, il prête serment et promet de respecter la Charte[139]. Le drapeau tricolore remplace définitivement le drapeau blanc[140]. Le régime s'installe doucement et la bourgeoisie prend le pouvoir en excluant la majorité du peuple[141]. Commencée sous le régime précédent, la conquête de la future Algérie s'accélère, relançant la politique française de colonisation. La France s'implante aussi dans le golfe de Guinée, au Gabon, à Madagascar, à Mayotte et signe un protectorat avec le Royaume de Tahiti[142]. La corruption et la crise économique font beaucoup de mécontents. Pour contourner l'interdiction de réunion, des opposants organisent des banquets républicains[143]. L'interdiction d'un de ces banquets provoque des agitations qui se transforment en émeute après des tirs de la troupe sur des manifestants. Louis-Philippe, qui refuse d'être responsable d'un massacre, abdique le lendemain. Le soir même, le gouvernement provisoire proclame la République[144].
Société[]
Ordres[]
Le royaume de France est une société d'ordres. Les hommes sont répartis en catégories sociales hiérarchisées. Traditionnellement, le roi distingue trois ordres avec lesquelles il communique pour les besoins de sa politique. Il existe pourtant à l'intérieur de ces ordres des ordres secondaires tout aussi hiérarchisés[145]. À partir du début du XVIIe siècle, les ordres déclinent doucement et ne finissent par subsister que face au pouvoir judiciaire[146].
Noblesse[]
La Noblesse est l'ordre le plus prestigieux[147]. L'origine de la noblesse repose sur la transmission héréditaire de l'honneur acquis sur le champ de bataille. Elle jouit de certains privilèges qui diffèrent selon les rangs. L'ordre est lui-même divisé en deux grands « états » : les gentilshommes et les nobles. Le premier titre est réservé à ceux dont la noblesse remonte très loin (en fait il est admis que la gentilhommerie commence à la quatrième génération)[148]. Parmi les privilèges de la noblesse leur sont réservés le droit de porter des armes, l'exemption d'impôts et de corvée, la possession de biens nobles (les roturiers sont tolérés par dispense), et certains bénéfices ecclésiastiques, mais doivent en contre-partie payer l'impôt du sang[149]. Ils jouissent de privilèges judiciaires, comme d'être exempts de certains tribunaux. La noblesse peut s'acquérir et dépend de la seule grâce du roi. Il faut néanmoins réunir plusieurs conditions comme celle d'avoir rendu des services, de n'exercer aucun métier manuel et de vivre « noblement »[150]. L'achat de certains offices où mairies procurent automatiquement la noblesse[151]. L'une des caractéristiques qui distingue le plus les nobles est l'honneur et sa sanction, le duel[152].
Clergé[]
Le clergé catholique rassemble tous les hommes qui servent Dieu. L'ordre est lui-même divisé en des ordres majeurs (évêque, prêtre, diacre et sous-diacre) et mineurs (acolyte, lecteur, exorciste et portier)[153]. Pour être reçu dans l'ordre, le clerc doit avoir manifesté sa volonté de servir Dieu, de savoir lire et écrire et ne pas avoir de défauts, par exemple être serf ou être endetté[154]. Ils disposent de privilèges comme ne pas être poursuivis par un juge séculier, être dispensés de service militaire et exemptés de certains impôts[155]. Le peuple doit payer la dîme en échange de la nourriture spirituelle qu'il reçoit de l'ordre[156]. Ils reçoivent le revenu attaché à un office ecclésiastique[157]. Avec l'édit de Nantes, les protestants deviennent un ordre du royaume avec ses assemblées et sa justice[158]. En revanche, les Juifs ne sont pas considérés comme un ordre, mais ont le statut d'étrangers privilégiés[159].
Tiers état[]
La définition d'un bourgeois varie selon les territoires. Dans certains, le terme de bourgeois qualifie juridiquement les habitants d'une ville, dans d'autres, il faut en plus remplir des conditions de fortune, alors qu'il peut arriver aussi que dans certains il ne qualifie que les marchands et maîtres de métier[160]. Mais communément, il désigne le non-noble qui ne travaille pas de ses mains[161]. Parmi les bourgeois, on trouve ceux qui vivent noblement, c'est-à-dire de leurs rentes et préparent leur anoblissement[162]. En dessous, le reste de la bourgeoisie est hiérarchisé selon la profession et la charge[163].
Les travailleurs manuels constituent la plus grande part de la population. Ils sont hiérarchisés selon leur métier avec au-dessus ceux ayant droit de corps et de communautés et en dessous les métiers libres[164], réglés et surveillés par les autorités. À l'intérieur des corps, les métiers sont hiérarchisés selon le prestige du travail ; à l'intérieur des métiers, les membres sont classés selon leur statut[165]. Au bas de la hiérarchie se trouvent ceux qui ne gagnent pas assez pour entretenir leur vie et les mendiants qui ont eux-mêmes des privilèges et une hiérarchie officielle selon la raison de la mendicité. Certains sortent de la société et deviennent vagabonds ou brigands vivant de larcins[166]. Les paysans représentent 80% de la population, ils existent de grosses différences sociales entre les propriétaires qui travaillent, mais vivent comme des bourgeois, et les travailleurs journaliers[167].
Corps[]
Le royaume de France est une société de corps, des groupes de personnes unies pour le bien commun et qui ont les mêmes intérêts. Chaque corps possède des armoiries et un sceau, ses membres ont des privilèges, un rang social. Ils ont des droits et des devoirs comme donner conseil au roi, payer des taxes collectives ou encore des aides diverses comme des services de guet, le contrôle des poids et mesures. Ils sont représentés dans les assemblées générales des villes, participent à l'élection des municipalités et rédigent des cahiers de doléances. Les corps se recrutent eux-mêmes, après une cérémonie et un serment. Ils ont des assemblées générales et élisent des dirigeants ou officiers. Ce qui est voté lors des assemblées fait force de loi et s'impose à tous les membres[168]. Les corps peuvent posséder des biens et passer en justice. Aucun corps n'existe sans la volonté du roi qui peut contrôler et imposer des mesures de tutelles[169]. Des communautés territoriales comme les villages, les paroisses[170], les villes[171] et les provinces[172] sont assimilés à des corps. Les corporations sont abolis le 14 juin 1791 par la loi Le Chapelier qui met fin à l'organisation du travail de l'Ancien Régime.[réf. nécessaire]
Lignages[]
La société d'Ancien Régime est une société de lignage, c'est-à-dire une suite de parents descendant d'un père commun. La fonction sociale du lignage est de déterminer le groupe de parents avec lequel un individu est lié et doit assistance[173]. Le lignage est bilatéral et inclut les parents du père et de la mère. Chaque membre du lignage peut trouver l'aide nécessaire auprès des autres membres du lignage. Ils peuvent coopérer pour une œuvre commune ou pour conquérir des avantages sociaux. Chaque lignage possède un chef[174]. Le mariage permet à un lignage d'étendre son influence et de s'élever socialement par le jeu des alliances[175].
À partir du XVIIe siècle, la famille (appelée aussi ménage ou maison) émerge du lignage[176]. Il s'agit d'un noyau plus compact rassemblant les gens vivant sous le même toit et partageant les revenus[173], mais aussi les domestiques vivant dans la maison[176]. L'État va légiférer pour faire du père le chef de famille avec une forte autorité sous son toit afin que le roi puisse commander la volonté de l'État à l'intérieur du foyer. La famille remplit des fonctions sociales comme l'éducation des enfants, assistance ou coopération économique mutuelle des époux. Chaque époux peut fonder son foyer en quittant l'habitation et l'influence des parents[177].
Fidélités[]
La société est unie par des liens de fidélité entre les hommes aussi importants durant l'époque féodale que sous l'Ancien Régime. Cette relation librement consentit, qui concerne d'abord les gentilshommes, est sous la forme « maitre-fidèle ». Le fidèle se dévoue entièrement à son maitre qu'il sert par tous les moyens qu'il peut même s'il doit donner sa vie aux combats. En échange, le maitre lui doit notamment protection matérielle et judiciaire. La relation entre les paysans et le seigneur repose aussi sur la fidélité, sauf que celle-ci n'est pas un libre choix et s'appuie sur la propriété de la terre. Les relations réciproques sont aussi beaucoup moins étendues. La relation féodale entre le vassal et son suzerain, repose sur le fief, ce qui fait que contrairement à la relation « maitre-fidèle », les deux parties ne se choisissent pas. Autour du roi, existe une relation « maitre-créature » avec les hommes de son gouvernement[178].
Féodalité[]
La France reste une société féodale jusqu'à la fin de la monarchie absolue, bien que celle-ci s'affaiblisse fortement à partir de la fin du Moyen Âge. Le vassal doit rendre hommage et fidélité à son seigneur, qui en contrepartie promet de protéger les droits de son vassal et lui donne un fief. La vassalité s'est d'abord se mettre au service personnel d'un seigneur, ainsi comme le dit l'adage « Le vassal de mon vassal n'est pas mon vassal ». Un seigneur peut alors exiger que son vassal s'engage contre le roi, même si celui-ci est le suzerain suprême au sommet de la pyramide que forme la structure féodale. À partir de Louis XI, l'obéissance au roi devient supérieure à celle qu'un vassal doit à son seigneur[179].
Une société chrétienne[]
La religion catholique tient une place essentielle dans la vie des Français. Les communautés religieuses sont organisées en paroisse autour d'une Église dont les cloches donnent les heures de la journée et invitent à la prière. Le curé est le guide spirituel de la communauté. Les fidèles ont l'obligation de connaitre les principales prières et de se faire accorder les sacrements pour marquer chaque étape de la vie. Les fêtes religieuses sont nombreuses et bien souvent chômées. Le clergé séculier doit aider les hommes à réussir leur vie de chrétien en les conseillant et les guidant. Le clergé régulier consacre son temps à la prière et à l'étude des textes sacrés pour embellir les cérémonies religieuses. La composition du clergé est très diverse. Le bas-clergé vit en campagne au contact des hommes, mais certains membres de l'Église se contentent de toucher les bénéfices de la fonction sans l'exercer et payent un remplacent à la place[180].
Institutions[]
Roi[]
Le personnage du Roi[]
Depuis les temps carolingiens, le roi, monarque de droit divin, est un personnage sacré qui incarne la souveraineté de l'État[181]. Il dispose de l'ensemble de ses attributions dès la mort de son prédécesseur, mais il n'est légitime aux yeux du peuple, qu'après la cérémonie du sacre qui se déroule dans la cathédrale de Reims. Cette cérémonie montre l'intervention de Dieu dans l'attribution de la couronne, qui se manifeste sous deux formes : le roi justicier, qui doit faire régner la paix et la justice divine, ainsi que le fait de guérir les écrouelles en touchant les malades. Le roi échappe à la condition commune, il est un personnage public qui à l'obligation de se montrer et ne peux pas posséder de vie privée[182]. Au temps des Mérovingiens, le roi tient surtout son pouvoir de la conquête, le prestige du chef et surtout de la fidélité personnelle qui l'unit à ses sujets[183].
Transmission de la couronne[]
La couronne n'est pas la propriété du roi. Il ne peut pas en disposer comme à sa guise, puisqu'il doit obéir aux lois fondamentales du royaume de France, dont la première est la loi salique[184]. La couronne se transmet de mâle en mâle en primogéniture, excluant les femmes et leurs descendants[185]. Mais aussi en écartant les bâtards et les protestants[186]. Les lois ne sont pas écrites et sont édictés au fur et à mesures des circonstances pour répondre à un problème posé[187]. Au temps des Carolingiens et aux débuts des Capétiens, la couronne est élective par acclamation des grands barons du royaume. Jusqu'à Philippe II Auguste, où la nouvelle dynastie est bien ancrée, les Capétiens ont pour tradition de faire acclamer leur fils ainé en même temps qu'eux[188]. Ils font ainsi progressivement de l'élection une formalité symbolique[187].
Pouvoirs[]
Sous l'Ancien Régime, la personne du roi concentre les trois pouvoirs, au terme d'un processus commencé à partir du XIIe siècle. Auparavant, le roi ne peut légiférer en dehors de son domaine sans le consentement de ses vassaux[189] et ne peut rendre la justice au détriment des juridictions seigneuriales et ecclésiastiques[190]. Par la suite, il est admis que la volonté du roi fait force de loi, mais il doit s'entourer de conseillers l'aidant dans ses décisions[191]. En matière judiciaire, le roi ne pouvant plus exercer personnellement la justice, il délègue ses pouvoirs à des tribunaux[192]. Son pouvoir possède néanmoins des limites qu'il doit respecter comme les assemblées d'états, les états généraux, les cours souveraines, le droit coutumier ou encore les lois fondamentales du royaume de France[193].
Le roi possède plus précisément des droits régaliens comme le pouvoir législatif, judiciaire, défensif et monétaire. Sa volonté fait force de loi qu'il exprime par des édits ou des ordonnances qu'il signe de la formule « car tel est notre bon plaisir ». Il peut aussi créer des offices et anoblir les roturiers. Le roi est le maître de la défense du royaume. Il a donc l'obligation de défendre ses vassaux et sujets, mais aussi de faire la guerre pour reconnaître des intérêts lésés par des puissances étrangères. Parmi ses autres obligations, il a celle de rendre la justice à ses sujets. Ces derniers peuvent évoquer tous litige devant la justice royale. Le roi a aussi le pouvoir de punir ou de faire grâce à n'importe qui, s'il estime que ça va dans les intérêts du royaume. À partir de la fin du Moyen Âge, le roi est le seul à avoir le pouvoir de battre monnaie, mais en contrepartie il est le garant de sa valeur[194].
Souveraineté[]
Du Xe siècle à la fin du XVe siècle, la royauté entame une lutte pour imposer sa pleine souveraineté à l'intérieur à l'extérieur du royaume. En France, il doit se libérer des liens féodaux et montrer qu'il est le chef suprême de tout le monde, en dehors des liens personnels, pour ne plus avoir à passer par les vassaux pour atteindre la masse des sujets du royaume. À l'extérieur du royaume, il se bat pour l'indépendance politique de la France pour qu'aucun pouvoir temporel ne soit au-dessus de lui, notamment l'Empereur et le Pape. Après une lutte de plusieurs siècles contre la Papauté, les souverains français parviennent à faire reconnaitre qu'ils ne tiennent leur pouvoir que de Dieu. Avec la doctrine du Gallicanisme, ils font reconnaitre l'indépendance de l'Église française par rapport au Pape[195].
Liste des rois[]
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Famille royale[]
La reine partage les honneurs du trône, mais ne peut prétendre à l'exercice du pouvoir, sauf durant les périodes de régence. Elles sont théoriquement écartées des organes de décision politique, mais si certaines ont exercé une forte influence. À partir du XVIIe, la famille royale est divisée en trois ordres. D'un côté les descendants directs du roi et de l'autre les proches parents (frères et sœurs et leurs enfants). Le troisième ordre est formé par les princes du sang, qui sont théoriquement tous les descendants mâles d'Hugues Capet, mais ils ne concernent dans la réalité que les descendants de Saint Louis[196]. Ils sont les seuls à pouvoir accéder à la couronne de France et le souverain doit les consulter sur les grandes affaires de l'État[197]. Les princes du sang en ligne masculine forment un troisième ordre. Le fils ainé du roi, ou l'ainé de ses descendants directs, est appelé Dauphin depuis 1349. Sa naissance est rendue publique et fêtée dans le royaume[196].
Gouvernement[]
Au Moyen Âge, le gouvernement central s'organise autour de deux éléments, la maison du roi, qui regroupe les serviteurs (grands officiers) du monarque et les serviteurs qui forment l'Hôtel du roi. De plus, le roi choisit parmi les ecclésiastiques, ses vassaux et des conseillers pour former la cour. Au XIIIe siècle, l'extension du domaine royal oblige à recruter des spécialistes des tâches administratives du pouvoir au détriment des princes et barons. C'est à cette période qu'émerge le conseil du roi qui traite des affaires du gouvernement au plus haut niveau[198]. Sous l'Ancien Régime, le conseil du roi est l'élément central du gouvernement, le roi y prend ses décisions souveraines qui orientent toute la vie politique du royaume[199].
Conseil du roi[]
Le Conseil est issu de la Cour de France du Moyen Âge où les proches et les vassaux du roi se réunissent pour donner conseil au souverain. La Cour suit le roi dans ses déplacements et se réunit chaque fois que le roi a besoin de prendre son conseil. Elle rassemble les personnes que les circonstances placent auprès du roi, même si certains personnages du royaume y siègent de droit : les membres de la famille royale, ainsi que les hauts barons et ecclésiastiques. Toutes les décisions importantes concernant le royaume doivent être délibérées au Conseil. À partir de Louis VII le Jeune, parallèlement au conseil large avec les grands du royaume, un conseil restreint se met en place avec des conseils envers qui le roi a confiance. La composition change au XIIIe siècle, les conseils siègent non plus en fonction de leur rang, mais en fonction de leur compétence à effectuer un travail administratif que les barons ne savaient ou ne pouvaient pas faire. Petit à petit, le roi ne les convoquent au Conseil que pour traiter les affaires les concernant. C'est à cette époque que les tâches administratives se séparent en trois branches ; judiciaire avec le Parlement, financière avec la Chambre des comptes et politique avec le Conseil du roi[200].
Le Conseil se réunit selon les besoins. Le roi peut y appeler qui il veut selon l'ordre du jour et les circonstances politiques, mais les grands officiers et princes du sang siègent naturellement au Conseil. À leur côté, siègent des hommes que le roi choisist pour leurs compétences, qui deviennent à partir du XIVe siècle les conseillers du roi. Le Conseil n'a qu'un rôle consultatif, puisque la décision dépend du roi, mais le Conseil peut siéger en l'absence du roi pour délibérer des affaires courantes. C'est lors des Conseils que le roi exerce sa justice retenue qui lui permet d'interrompre la justice ordinaire pour s'en emparer[201]. En 1497, le Grand Conseil se détache du reste du Conseil et siège pour s'occuper des affaires judiciaires que le roi souhaite soustraire de la juridiction des parlements[202].
À partir d'Henri II, le Conseil commence à se réglementer et à être réparti entre différentes formations spécialisées[203]. Le Conseil des affaires est un groupe restreint de conseils intimes du roi qui gèrent les affaires importantes et secrètes de l'État. Le roi y appelle les personnes qu'il souhaite en fonction des circonstances politiques. Ce conseil secret n'a pas d'existence officielle et dépend seulement de la volonté royale. Avec Louis XIII, il s'organise, devient officiel et prend le nom de Conseil d'En haut. C'est à ce moment qu'il devient l'organe suprême pour les décisions sur la politique étrangère, la guerre, l'intérieur et les plus importantes affaires financières[204]. Sa composition devient de plus en plus fixe et certains y siègent de droit comme le Premier Ministre, le Chancelier, le surintendant des finances ou encore le secrétaire d'État des affaires étrangères. Les autres membres sont nommés par le roi. À la même période, Le Conseil des dépêches se détache pour s'occuper des affaires intérieures. Le Conseil pour les finances est institué en 1563, il existe de façon intermittente en fonction des réorganisations des institutions financières[205]. Il traite les affaires financières et est en dernier ressort le Conseil qui traite les affaires générales (il est supérieur hiérarchiquement au Conseil d'En haut). Le Conseil privé (ou Conseil des parties) est le Conseil qui siège comme cour suprême de justice pour les procès des particuliers[206].
Sous Louis XIV, deux sortes de conseils se distinguent qui vont demeurer jusqu'en 1791 : les conseils de gouvernement et les conseils de justice et d'administration. Le Conseil d'En haut (plus tard le Conseil d'État) est un conseil très restreint (de trois à sept membres), qui ne comprend que des personnes nommées par le roi et aucune de droit[207]. Si le Conseil est compétent pour statuer sur tous les sujets politiques, ses compétences se restreignent petit à petit à la politique étrangères et militaires[208]. Le Conseil des dépêches s'occupe des affaires intérieures du royaume, en lisant et en répondant aux dépêches venant des provinces, mais aussi en examinant les contentieux politiques. Les principaux membres du gouvernement y siègent. Le Conseil royal des finances assiste le roi dans l'exercice de sa fonction d'ordonnateur et détermine la politique économique de l'État[209]. Le Conseil royal de commerce a une existence épisodique et gère la politique commerciale et économique[210]. Lors de situations bien particulières, des conseils spécialisés sont créés pour traiter des dossiers liés à l'actualité, comme le Conseil de santé pour gérer la peste de Marseille[211]. Le 9 août 1789, ils sont fusionnés en un conseil unique qui prend le nom de Conseil d'État[210].
Les conseils de justice et d'administration comprend le Conseil privé qui est toujours la cour suprême de justice, mais est réformé entre 1673 et 1738. Il comprend de nombreuses personnes (jusqu'à 50) et son action prend trois formes différentes : l'évocation, qui est une intervention dans un procès en cours d'une juridiction supérieure ou différente ; la cassation, qui permet de ne pas juger l'affaire, mais vérifier si la loi a été bien appliquée ; et le règlement de juges qui est un arbitrage dans un conflit entre deux cours supérieures[212]. Le Conseil d'État et des finances disparait à la fin du XVIIe siècle, divisé en deux commissions : la Grande et petite direction des finances ont comme mission de juger les contentieux en matière financière[213].
Conseil d'En haut | Conseil des dépêches | Conseil royal des finances | Conseil royal de commerce | Conseil privé | Conseil d'État et des finances | Grande direction | Petite direction | |
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Présidents | Roi | Roi | Roi | Roi | Chancelier | Chancelier | Chancelier | Chef du Conseil royal |
Premier ministre | Siège | Siège | Siège | Siège | Non | Non | Non | Non |
Ministres d'État | Tous | Tous | Certains | Certains | Non | Non | Non | Non |
Chancelier | S'il est ministre d'État | Siège | Siège | Siège | Siège | Siège | Siège | Non |
Secrétaires d'État | S'ils sont ministres d'État | Tous | Certains | Certains | Exceptionnelle | Exceptionnelle | Non | Non |
Contrôleur général des finances | S'il est ministre d'État | Siège | Siège | Siège | Exceptionnelle | Siège | Siège | Siège |
Chef du Conseil royal des finances | S'il est ministre d'État | Siège | Siège | Non | Non | Non | Siège | Siège |
Intendants des finances | Non | Non | de 1 à 4 | de 1 à 3 | Tous | Tous | Tous | Tous |
Conseillers d'État | Non | de 1 à 3 | 1 ou 2 | 1 ou 2 | Tous | Tous | Certains | Certains |
Maîtres des requêtes | Non | Non | Non | Non | Tous | Tous | Certains | Certains |
Grands officiers[]
Au Moyen Âge, les grands officiers remplissent des tâches domestiques qui leur donnent un rôle très important dans le gouvernement du royaume, dont les charges sont souvent héréditaires et au revenu important. C'est à partir de Philippe Ier que chaque attribution se précise. Le Sénéchal, qui existe depuis les Carolingiens, est le premier des grands officiers. Il dirige la maison du roi, mais supervise aussi l'administration et les agents du roi, commande l'armée et rend la justice royale. Son pouvoir excessif fait que le roi préfère confier cette charge à des seigneurs fidèles et souvent loin du palais, avant de la supprimer en 1191. Le bouteiller gère la cave du roi, mais aussi les vignobles du domaine royal et le commerce du vin en général. Par la suite, il s'occupe de différentes tâches financières comme la coprésidence de la Chambre des comptes, voire des missions politiques. L'office est supprimé en 1449. Le chambrier est responsable de la chambre du roi, mais aussi tout ce qui concerne l'entretien du palais et des effets et du Trésor du roi. Le connétable, dont la charge est créée sous les Carolingiens, s'occupe des écuries royales avant de se voir attribuer les attributions militaires du sénéchal. Avec la Guerre de Cent Ans, il devient le chef militaire du royaume et toute la Noblesse est placée sous son commandement. Le chancelier est le rédacteur et l'expéditeur des actes royaux depuis l'époque franque[214].
La hiérarchie des Grands officiers est établie sous Henri III[215]. Le connétable est le premier d'entre eux, mais sa position très avantageuse fait que la charge est souvent vacante, avant d'être supprimée en 1627. Il s'occupe de l'administration et du financement de l'armée, mais est aussi considéré comme le chef de l'armée[216]. Il est remplacé par le chancelier comme premier des Grands officiers (deuxième auparavant)[217], le grand maître qui s'occupe du service intérieur de la Maison du roi, le grand chambellan qui administre la chambre du roi, l'amiral qui est le chef de la flotte[215]. Les Maréchaux sont les chefs de l'armée sous l'autorité du connétable. Ils sont à la tête de la Compagnies des prévôts des maréchaux qui exerce la justice militaire et le maintien de l'ordre dans les campagnes. Ils tiennent le tribunal du Point d'honneur qui règle les conflits entre gentilshommes pour éviter le duel[218]. Le grand écuyer est le chef de l'écurie royale. À partir du XVIIe siècle, la majorité deviennent des charges purement honorifiques de cour. Seul le Chancelier et les charges militaires restent des charges gouvernementales[215].
Chancellerie[]
Le chancelier est un des grands officiers du royaume. Il est le chef de la chancellerie qui a pour mission de rédiger les actes royaux généraux, législatifs ou spéciaux. Son rôle évolue avec la centralisation qui s'accentue à la fin du Moyen Âge et devient même la tête du gouvernement puisqu'il supplée le roi durant son absence, prend la parole en son nom lors d'occasion lors des États généraux et préside le parlement[219]. Avec la hiérarchisation des grands officiers sous Henri III, le chancelier est le deuxième en dignité, puis le premier après la suppression de la charge de connétable en 1627. Il a plusieurs attributions ; le contrôle et le scellage des actes royaux lors de cérémonie de l'audience du sceau. Il doit aussi vérifier si les décisions royales sont conformes à la justice et aux intérêts du royaume, dans le cas contraire il peut refuser le scellage ; il est le premier magistrat du royaume et le porte-parole du roi lors des cours souveraines ; il est le chef du Conseil qu'il préside lors de l'absence du souverain. Ses compétences politiques déclinent au gré des réformes. En 1661, il est écarté du Conseil d'En Haut et perd le statu de ministre d'État ; il s'occupe de la vie intellectuelle du royaume : à partir de 1566, il contrôle la librairie, ce qui lui permet théoriquement de de contrôler et de censurer tous les livres qui paraissent[220].
Au XVIIIe siècle, se met en place un Conseil de chancellerie pour conseiller et faire appliquer les décisions du chancelier. Il est compétent sur le fonctionnement de la chancellerie, de l'administration de la justice et de la librairie. Il a le statut de tribunal administratif qui juge les contestations sur la réglementation sur les livres[221]. Lorsque le chancelier est en disgrâce ou empêché d'exercer ses fonctions, le roi lui retire les sceaux et les confie à un garde des sceaux qui devient un grand officier de la couronne. À certains moments, le garde des sceaux est nommé alors que le chancelier est en fonction, les deux hommes se partagent alors les attributions du chancelier[222].
La Grande et la Petite Chancellerie dépendent directement du chancelier. Les secrétaires du roi travaillent à la Grande Chancellerie, ils ont le monopole de la rédaction et de l'expédition des actes royaux. Une dizaine au XIIIe siècle, leur nombre va atteindre jusqu'à 350 en 1694, bien au-dessus de ce qu'exige le fonctionnement de la chancellerie. La charge est transmissible et le moyen le plus simple d'acquérir la noblesse, ce qui fait que la plupart des secrétaires ne remplissaient pas leurs tâches. Parmi les autres officiers de la Grande chancellerie, on trouve le grand audiencier qui est l'ordonnateur de l'audience du sceau et compte les droits perçus sur le scellage des lettres, le contrôleur général qui hérite des attributions financières du grand audiencier, le garde des rôles des offices de France, qui tient à jour la liste des offices disponible, le chauffe-cire qui procède à l'opération de scellage. Au XVe siècle, les Petites Chancelleries sont créées en Province pour rapprocher les administrés du service des sceaux. Les lettres qu'elles délivrent ne s'appliquent que dans la juridiction où est établie la Petite Chancellerie. Les effectifs sont plus réduits que ceux de la Grande Chancellerie, mais les charges sont les mêmes[223].
Secrétaires d'État[]
La fonction de secrétaire d'État apparait au XVIe siècle d'abord au sein de la chancellerie, avant de s'en détacher pour devenir pleinement autonome. Les secrétaires d'État ont pour origine les notaires du roi, chargés de mettre en forme les actes personnels du souverain. Leurs attributions évoluent dans le temps et certains récupèrent des tâches politiques et diplomatiques importantes. En 1547, les quatre secrétaires sont répartis avec pour chacun des pays étrangers et provinces du royaume où il est chargé d'expédier les affaires de l'État, puis plus tard certains départements comme la guerre où la religion. Ils deviennent alors les exécuteurs de la volonté royale et les chefs de l'administration centrale de l'État. Ils deviennent si puissants que le souverain prend une série de mesures pour définir leurs pouvoirs qui vont varier jusqu'en 1791[224].
Justice[]
Le roi doit d'abord rendre la justice à ses sujets. Cette fonction lui vient de sacre et il est admis que la justice est déléguée par Dieu aux monarques, se dernier ne pouvant exercer personnellement la justice, la délègue à un personnel qualifié. La justice est déléguée lorsqu'elle est exercé par des magistrats au nom du roi et retenue lorsque le roi et son Conseil interviennent directement dans une affaire. La justice royale déléguée comprend les juridictions de droit commun et les juridictions d'exception. Les premières forment une hiérarchie pyramidale comprenant quatre degrés. En bas, les prévôtés, vicomtés et châtellenies datent du XIe siècle, viennent ensuite les bailliages et sénéchaussées qui apparaissent au XIIe siècle, puis les présidiaux créés en 1552 et enfin les parlements et conseils souverains. Le Conseil du roi, cour suprême de justice est tout en haut de l'édifice. Les juridictions d'exception sont habilitées à juger certaines catégories d'affaires ou de personnes. Des tribunaux supérieurs peuvent intervenir dans une affaire en cours devant un tribunal inférieur et s'en saisir par une procédure d'évocation[225].
À côté de la justice royale, il existe des dizaines de milliers de tribunaux seigneuriales chacun avec des compétences diverses, mais aussi des tribunaux municipaux qui voit leurs compétences réduites à partir du XVIe siècle. À la fin du Moyen Age, les juristes développent la théorie que le roi étant le seigneur des seigneurs, ceux-ci rendent la justice en son nom. L'État royal réduit au fil des siècles les compétences de la justice non royale en théorisant la notion de « cas royal » qui réserve au roi les affaires considérés comme importante ou engageant sa souveraineté. De plus, elles sont limitées par l'appel, puisqu'il est possible de faire appel d'une décision d'un tribunal non royal auprès d'un tribunal royal[225]. La justice ecclésiastique a pour mission de juger les affaires internes de l'Église et les fidèles en matière de foi et de morale. À partir du règne de Philippe II Auguste, la concurrence devient forte avec les juges laïques sur des affaires de trouble à l'ordre public. Un processus est entamé pour un contrôle royal des tribunaux d'Église, notamment avec la notion d'abus au XVe siècle qui permet de faire appel devant les tribunaux royaux si un juge d'Église dépasse les bornes de sa compétence[226]. Cet ordre judiciaire est aboli en août 1790[227].
Justice royale[]
La prévôté (appelée aussi : châtellenie, vicomté, viguerie, bailie ou jugerie selon les provinces) est la plus petite et la plus ancienne des juridictions royales locales. Elle reçoit principalement, les affaires civiles et criminelles des roturiers en première instance. Jusqu'à la fin du Moyen Age, son personnel est composé d'un juge et un greffier, avant d'augmenter et de se spécialiser avec des lieutenants, conseillers et procureurs du roi[228]. Le bailliage et sénéchaussée est créé par les ducs de Normandie et repris par les rois de France à la fin du XIIe siècle avec pour mission principale de contrôler le travail des prévôts. Au fil des siècles, ils perdent leurs compétences administratives et militaires, pour ne garder que leurs pouvoirs judiciaires[229]. Ils jugent en appel des tribunaux royaux inférieurs, seigneuriaux et municipaux. En première instance, ils jugent les affaires concernant les nobles et le roi. Sous l'Ancien Régime, le bailli ne réside pas dans sa circonscription et laisse des magistrats exercer ses attributions[228].
Le présidial est créé en 1552 pour rapprocher la justice des justiciables. Il peut juger les délits et crimes des gens de guerre et des affaires civiles en première ou dernière instance en fonction des sommes en jeu. L'institution décline au fil des années, victime de l'hostilité des parlements. La composition des tribunaux varie et neuf juges sont nécessaires pour rendre une sentence. Le présidial de Paris, le Châtelet, occupe une place spéciale dans l'organisation judiciaire puisque son chef est le roi, représenté par le garde de la prévôté de Paris et que sa compétence s'étend à l'ensemble du royaume pour certaines affaires. C'est aussi un tribunal d'exception où certaines communautés religieuses où l'université de Paris ont le droit de n'être jugées qu'au Châtelet[228]. Le parlement et les conseils souverains sont créés entre le XIIIe siècle et le XVIIIe siècle par, selon les provinces, démembrement d'un ressort existant, transformation d'une cour seigneuriale ou simple création. Ils ont des attributions judiciaires de dernière instance, ils sont cours d'appel pour l'ensemble des juridictions inférieures de droit commun, ainsi que les juridictions seigneuriales, municipales, spécialisées et certaines affaires ecclésiastiques. Ils jugeaient aussi des affaires d'exceptions comme celle touchant la couronne. Celle de Paris a des compétences spécialisées comme celle de juger les princes et pairs de France. Un parlement est composé de plusieurs chambres permanentes et temporaires ; La Grand-Chambre, est la plus importante, le roi tient lit de justice et les décisions les plus importantes y sont prises ; La chambre des requêtes a pour mission de recevoir les particuliers et de les envoyer devant la juridiction compétente, puis à l'époque moderne de juger en première instance ; La chambre des enquêtes instruit les affaires pour le compte de La Grand-Chambre. Un parlement est dirigé par le premier président, puis chaque chambre à son propre président. Le gros de l'effectif est composé des conseillers qui ont voix délibérative, des magistrats et auxiliaires de justice[230].
La justice retenue est celle ou le roi juge en personne. Elle devient très rare sous l'Ancien Régime et s'exerce de différentes manières. Le lit de justice est une séance solennelle du Parlement en présence du roi. Le pouvoir de délégation des magistrats est alors suspendu et le Parlement devient un simple organe de conseil. Le roi exerce aussi la justice à l'aide des lettres de cachet. Il s'agit de priver des personnes de liberté pour empêcher la justice ordinaire de tenir son rôle. Elles sont utilisées pour empêcher des procès qui nuiraient aux intérêts du Royaume ou de la famille royale. Elles doivent être vérifiées par le lieutenant général de police pour valider le bien-fondé et éviter les abus de pouvoir. Le roi dispose aussi du droit de grâce qui lui permet d'annuler une peine[231].
Justice seigneuriale[]
Avec la dislocation de l'État royal vers le Xe siècle, les seigneurs récupèrent une partie du pouvoir judiciaire. Selon les régions, le seigneur exerce la basse (notamment la justice foncière) ou la haute justice (justice de sang qui permet notamment de prononce la peine de mort). Le fonctionnement des tribunaux seigneuriaux n'obéit à aucune règle, seulement à la volonté du seigneur. La majorité des coutumes reconnaissent que la cour doit être composée de quatre vassaux au minimum. Il faut attendre la fin du Moyen Age pour que les cours seigneuriales deviennent plus professionnelles[232]. À partir du XIIe siècle, une lutte commence avec le pouvoir royale, pour contrôler et abaisser la puissance de cette justice, avec l'introduction de trois recours : l'appel, la prévention et les cas réservés au roi[233]. Elle est encore vivante à la veille de Révolution, mais les jugements importants doivent être confirmés par un Parlement et elle règle surtout les conflits de proximité[234].
Justice ecclésiastique[]
La justice ecclésiastique a comme compétence de traiter les affaires internes de l'Église et de foi et de morale des fidèles. La juridiction principale est celle des évêques dans le cadre de leur diocèse. Accaparés par leurs nombreuses tâches, ils délèguent dès le XIIe siècle, leurs fonctions judiciaires à un juge appelé l'official qui sont aidés par toutes une administration. Des juridictions d'exceptions, appelés Inquisition, sont mis en place entre le XIIe et XIVe siècle pour juger avec une procédure spéciale, les hérétiques[235]. À partir du XIIIe siècle, une lutte commence avec le pouvoir royal pour abaisser les compétences de la justice d'Église dans de nombreux domaines qui relève aussi bien de la foi que du maintien de l'ordre. La royauté introduit les concepts des cas privilégiés et d'abus. La Pragmatique Sanction de Bourges permet au roi d'invoquer le contrôle de la justice ecclésiastique[236].
Justice municipale[]
La justice municipale s'étend à l'ensemble des habitants d'une ville. Leur compétence varie d'une commune à l'autre et rare sont celles qui ont pleines justices, les compétences sont le plus souvent partagés avec le seigneur. Les institutions et droit appliqué, varient selon les régions et les chartes délivrées. La justice peut être rendue par : un agent du seigneur, un tribunal de police composé des habitants, les maires ou encore les échevins[237]. La justice municipale décline à partir du XVIe siècle, sous l'effet des mesures législatives du pouvoir royal et des dispositions particulières appliqués aux villes rebelles. Au XVIIIe siècle, la majorité des villes ne conservent plus que les attributions de la police, hormis certaines villes fidèle à la couronne comme Toulouse[234].
Personnel judiciaire[]
Le personnel judiciaire se fixe au cours du XVIe siècle. Il est divisé en deux catégories d'officiers : les magistrats et les auxiliaires de justice. Les magistrats du siège sont ceux qui jugent les affaires, ils sont divisés en trois catégories : les magistrats principaux qui dirigent le tribunal (appelés président dans les cours souveraines et présidiaux et lieutenant dans les juridictions inférieurs) ; les conseillers qui étudient et jugeaient les procès ; et les magistrats spécialisés qui occupent des fonctions particulières. Le parquet, dont les origines remontent au XIIIe siècle, est chargé de défendre les intérêts du roi et de la société pour assurer le bien public. Il est composé du procureur du roi qui dirige le parquet dans la juridiction et des avocats du roi qui portent la parole du roi dans les procès. Les magistrats sont aidés dans leurs tâches par des auxiliaires de justice : les greffiers qui consignent par écrit les décisions du tribunal ; les huissiers et sergents qui assurent le déroulement de l'audience et signifient les sentences ; les procureurs qui rédigent et suivent la procédure ; les comptables qui encaissent les frais de justice et montant des peines ; et les avocats qui conseillers et plaident lors d'une audience[238].
Finances[]
Les finances royales lors du Moyen Âge[]
L'ordinaire s'occupe de la gestion du domaine royal par les trésoriers de France et de la monnaie royale[239]. Les revenus du domaine sont divers, ils peuvent être fixes comme les péages ou irréguliers comme les taxes perçues sur les foires[240]. Avant Philippe II Auguste, la perception des revenus est gérée par le prévôt. Par la suite, les baillis et sénéchaux ont la responsabilité de cette tâche, puis après 1320 les receveurs récupèrent le monopole des recettes. Le trésor royal est placé, depuis le règne de Louis VII le Jeune, sous la responsabilité de l'Ordre du Temple. Philippe Auguste leur adjoint un bureau des comptes où siègent six bourgeois parisiens et le clerc du roi qui établissent un véritable budget de la royauté. Philippe IV le Bel retire la gestion du trésor aux chevaliers du Temple et la confie à des trésoriers royaux après 1295 qui ont pour mission un bilan prévisionnel des dépenses et recettes pour chaque receveur. Leur compétence grandit à partir du XIVe siècle, puisqu'ils sont chargés de l'administration des ressources du domaine et mènent des contrôles à travers le royaume. À partir de 1379, l'un d'eux demeure continuellement à Paris aidé par le changeur du Trésor[241]. Les quatre autres se verront assigner chacun une circonscription à partir du milieu du XVe siècle[242].
L'extraordinaire s'occupe de la gestion de l'impôt. Il est institué à partir du XIVe siècle, pour faire face aux dépenses de la royauté qui ne peuvent plus être couvertes par l'ordinaire[239]. Avant cette date, les souverains prélèvent des taxes auprès de l'Église pour financer les croisades, puis à partir de Philippe IV le Bel différentes expériences sont menées pour diversifier les formes de contribution. Les défaites lors de la guerre de Cent Ans font prendre conscience que des contributions sont nécessaires pour établir la défense du royaume[242]. D'abord exceptionnelles et avec l'accord des assemblées d'État, elles deviennent permanentes à partir de 1436 pour financer une armée permanente[243].
Les premières levées d'impôts sont confiées à des commissaires. Les États généraux de 1355 mettent en place une véritable administration gérée par neuf généraux superintendants (trois pour chaque ordre) qui eux-mêmes choisissent des représentants pour chaque circonscription qui ont comme mission de répartir la taille entre les paroisses. Un receveur général et particulier assure les tâches comptables. L'administration passe très rapidement sous contrôle royal qui nomme les superintendants généraux réduits à quatre qui s'occupent chacun d'une circonscription. Les agents du trésor et les superintendants généraux se retrouvent dans un conseil commun des finances[244].
Les finances royales lors de l'Ancien Régime[]
C'est sous François Ier que l'administration financière du Moyen Âge connait d'importantes réformes. En 1523, il crée une caisse centrale appelée trésor de l'Épargne. Gérée par un comptable de haut rang, elle finance les dépenses de la cour et du gouvernement. Les pouvoirs des trésoriers et généraux des finances sont réduits et fusionnés quelque temps plus tard sous le titre de trésorier général. Le royaume est divisé en seize généralités dirigées par un trésorier général. Les finances ordinaires et extraordinaires sont réunies sous la même administration. Le nombre de trésoriers généraux est ensuite augmenté pour chaque généralité[245]. L'administration centrale des finances est désormais dirigée par le roi assisté de son conseil où émergent par la suite quelques spécialistes choisis par le roi, qui supervise et coordonne l'administration financière. Ainsi apparaissent les titres de contrôleur généraux des finances, intendants et surintendant des finances[246].
Les intendants des finances apparaissent en 1552 pour gérer les fonds du voyage d'Allemagne et rendre compte au conseil. Au départ au nombre de quatre, leur nombre varie selon les époques. Ils siègent en ministère qui remplace celui formé par les trésoriers de France et les généraux des finances[246]. Parmi eux, un des membres émerge et est à l'origine du titre de surintendant des finances, mais sa fonction est intermittente avec le conseil des finances et est supprimée en 1661[247]. C'est un titre prestigieux qui donne à son possesseur la possibilité d'exercer par délégation la fonction royale d'ordonnateur des dépenses de l'État[248].
Le titre de surintendant des finances est supprimé en 1661, Louis XIV le remplace par un conseil royal des finances qu'il préside. En 1665, le roi ne garde qu'un contrôleur général des finances et supprime les autres charges[249]. Jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, le contrôleur général est le membre du gouvernement qui a le plus d'attributions, c'est aussi le poste qui change le plus souvent de titulaire[250]. Le titre n'est pas toujours constant, par moments il est remplacé par un conseil ou porte un nom différent comme directeur général des finances[251]. Il dirige l'administration financière qui comprend en autre la gestion du Trésor royal, l'établissement du budget, la gestion des impôts, du domaine royal de la monnaie. Il a la tutelle de la Ferme générale et contrôle l'ensemble des activités économiques[252]. Il est aidé par l'administration centrale des finances qui comprend plusieurs départements. Le premier commis des finances gère, avec le contrôleur général, le Trésor royal. Les intendants des finances dirigent les départements comme un ministère avec une large autonomie[253]. Les intendants du commerce sont les rapporteurs et les animateurs du bureau du commerce[254]. En 1791, le contrôle général des finances est remplacé par le ministère des contributions et revenus publics et par le ministère de l'intérieur pour ses tâches non financières[255].
Impôts[]
Le premier impôt direct qui se généralise est le fouage, qui a l'inconvénient de ne pas être précis dans ses prévisions. La taille la remplace progressivement dans le royaume et devient monopole royal en 1439 puisque les seigneurs ont interdiction de la lever[243]. Les nobles (qui versent l'impôt du sang) et les clercs en sont exempts, mais l'Église paye la décime[256]. Parmi les impôts indirect, la gabelle du sel tient une place à part. Elle est gérée par les grenetiers, des agents royaux qui vendent le sel. La gabelle est différentes selon les pays de « petite » et « grande » gabelle et exempt dans certains autres. Les marchandises sont taxées à l'exportation, car il est considéré que cela diminue la richesse du royaume[257].
Pour percevoir les impôts indirects sont créées les fermes. À l'origine, chaque impôt possède plusieurs fermes distinctes qui ont des pouvoirs comme la commercialisation ou la fiscalité et qui collaborent avec les agents royaux qui possèdent les pouvoirs de justice et de police. À partir d'Henri III, l'État entame un processus pour centraliser les fermes avec les Cinq Grosses Fermes. Les fermiers doivent s'engager à verser une somme globale chaque année. En 1726 est créé la Ferme générale qui devient une administration qui ne relève pas juridiquement de l'État[255], mais qui comprend des dizaines de milliers de personnes qui ont un statut semblable aux fonctionnaires[255].
Monnaie[]
Jusqu'au XIIe siècle, il n'existe pas de monnaie commune à l'ensemble du royaume. Chaque seigneur (petit ou grand), évêque ou ville bat sa propre monnaie. Philippe II Auguste tente d'imposer le denier parisis qui a cours à Paris, puis s'empare des ateliers qui frappent le denier tournois qui a cours dans le centre et l'ouest du royaume[239]. Saint Louis impose la monnaie royale à l'intérieur du domaine royal et en concurrence avec la monnaie des seigneurs en dehors du domaine. Au fil des ordonnances royales, les monnaies seigneuriales perdent de plus en plus d'influence et d'indépendance. C'est en 1347 que la frappe de monnaie devient un monopole royal[258], mais le roi devient en contrepartie le garant de sa valeur[259].
Armées[]
Jusqu'au XIIe siècle, l'ost royal est composé par les chevaliers et grands officiers du palais. Elle ne devient une véritable armée qu'avec l'ajout des grands vassaux avec leurs propres troupes et des milices piétons fournies par les villes et les abbayes[260]. Le service vassalique décline au cours du XIIIe siècle, mais en contrepartie le service militaire royal s'élargit à tous les seigneurs du royaume[261]. La Guerre de Cent ans permet une évolution de l'armée. Les Grandes compagnies sont employées, contre finances elles fournissent les services de dizaines de professionnels de la guerre. Lors de leur démobilisation, elles n'hésitent pas à piller la population et à mettre des provinces en coupe réglée. Le connétable devient le chef des armées françaises, devant même les grands princes et officiers, mais aussi le responsable de la justice militaire. En 1445 sont créées les compagnies d'ordonnance, les premières armées permanentes du royaume. Sous la surveillance d'un capitaine, elles mènent des opérations militaires en cas de guerre et restent en garnison dans des villes pour assurer la sécurité quotidienne du royaume. Dans le même temps, une archerie, appelé Franc-archer, est formée, remplacée à terme par des artilleries à poudre[262].
L'armée est réformée en profondeur au XVIIe siècle. L'administration civile est développée pour gérer l'armée et la hiérarchie militaire est réorganisée pour favoriser l'avancement au mérite à la petite noblesse et la bourgeoisie. Une ébauche de conscription est mise en place avec la milice provinciale, une armée de réserve composée d'hommes tirés au sort. Le service d'ost est convoqué pour la dernière fois en 1703[263]. Le secrétariat d'État à la guerre est créé en 1472. Ses attributions vont augmenter au fil des années jusqu'à posséder l'ensemble des attributions militaires au milieu du XVIIIe siècle et surtout après la disparition de la charge connétable en 1627[264]. En 1791, il est remplacé par le ministère de la guerre, sans continuité avec l'ancienne administration[265]. L'administration centrale du département de la guerre commence à se développe en 1635. Au fil des guerres, elle s'organise et se structure en bureaux spécialisés[266].
Marine[]
La flotte française apparaît en même temps que les extensions territoriales au XIIIe siècle qui offre des débouchés à la mer au domaine royal. La première marine est composée de petits bateaux de transport sans capacité de combat avec des pirates comme capitaine. Pour les grandes campagnes en Méditerranée, le roi doit faire appel à des flottes génoises ou vénitiennes, alors qu'en Atlantique et dans la Manche ils réquisitionnent les bateaux de pêche et de commerce. C'est sous Philippe IV le Bel, qu'une véritable politique de marine militaire est mise en place avec la création d'un arsenal à Rouen pour construire de manière industrielle des navires de guerre. Au milieu du XIVe siècle, l'amiral, dont la charge est créée en 1270, se voit attribuer les mêmes pouvoirs sur la mer que le connétable sur la terre. Son autorité s'exerce aussi bien sur les navires militaires, que les navires civils comme les pêcheurs ou les commerçants, il est aidé par des lieutenants dans chaque grand port. Au fil des annexions, des provinces maritimes sont créées (Provence, Bretagne et Guyenne) avec à leur tête des amiraux qui entrent en conflit avec l'amiral de France dont le pouvoir devient limité à la Normandie et la Picardie[267].
C'est sous Richelieu qu'est créée une véritable Marine royale permanente en unissant et centralisant les charges liées au pouvoir maritime. Elle commence en 1626, avec la création du titre de grand maître de la navigation et sa nomination à ce poste. L'année suivante, la charge d'amiral est supprimée, car dotée d'un trop grand pouvoir automne. Jusqu'en 1635, il achète ou fait disparaitre les charges concurrentes, à cette date il possède la totalité du pouvoir maritime[268]. La charge de grand maître de la navigation est supprimée et celle d'amiral rétablie en 1669, mais elle devient essentiellement honorifique et souvent exercée par des enfants pour ne pas gêner le secrétaire d'État de la marine qui récupère la réalité du pouvoir maritime, malgré des tensions lorsque le titulaire de la charge d'amiral devient majeur. Le secrétariat d'État de la marine est à la tête des administrations militaires et commerciales et possède le pouvoir, outre les flottes, les ports et arsenaux, les consulats, les colonies et la tutelle des compagnies de commerce[269].
Affaires étrangères[]
Au Moyen Âge, le roi envoie des ambassadeurs auprès des cours étrangères, mais toujours pour une mission précise et il rentrait une fois celle-ci finie. C'est à partir du XVIe siècle, que des ambassadeurs permanents font leurs apparitions[270]. Le département des affaires étrangères est créé en 1589 (supprimé de 1624 à 1626), il est responsable de la correspondance avec les chefs d'État et avec les agents diplomatiques accrédités par la France. Il a aussi comme compétence de s'occuper du commerce extérieur en concurrence avec d'autres bureaux. Le secrétaire d'État est membre du conseil d'En haut qui délibère principalement sur la politique étrangère. Au XVIIIe siècle, les compétences sont scindées entre le département politique, les services spécialisés et les agents rattachés à aucun service[271].
Les bureaux du département politique sont dirigés par un premier commis ayant sous ses ordres trois à six commis. Les attributions sont selon les époques divisés en secteurs géographiques ou simplement en deux bureaux, un du Nord et un du Midi. Les services spécialisés apparaissent au fur et à mesure du siècle, d'abord avec le dépôt des archives, puis le bureau des fonds chargé de gestion financière, mais aussi de tâches administratives comme la délivrance de passeport, le bureau des interprètes, le bureau topographiques et un bureau géographique pour conserver les cartes. Le secrétaire d'État peut faire appel à des conseils ou des experts pour résoudre des problèmes de droit international comme le service d'un jurisconsulte pour le droit germanique. Sous Louis XV, une diplomatie occulte est mise en place à côté de la diplomatie officielle[272].
L'ambassadeur représente la personne du roi, à son départ il reçoit des instructions qui définissent les lignes directrices de sa mission. Le roi n'envoie pas des ambassadeurs partout et dans certains pays il entretient des légations et des résidences, voir des envoyés occasionnels pour les souverains lointains. La hiérarchie est la suivante : ambassadeurs, ministre plénipotentiaire et les résidents. Tous sont secondés par des secrétaires qui peuvent s'occuper des affaires en cas d'indisponibilité de leur supérieur. Durant sa mission, l'ambassadeur entretient une correspondance avec le Secrétaire d'État pour l'informer de la situation politique, mais aussi à conclure les traités[273].
Fonction publique[]
Pour gouverner le royaume, le roi doit s'appuyer sur de nombreux agents qui possèdent des statuts différent. Ils se répartissent en trois grandes catégories : les officiers, les commissaires et les fonctionnaires[274]. Les officiers ne sont pas qu'au service de l'administration royale, il existe des officiers seigneuriaux, municipaux ou encore provinciaux. Deux types d'offices se distingues, les offices casuels qui reviennent au roi à la mort du titulaire (ou pour non-exercice de son office) et les offices domaniaux qui sont vénaux et héréditaires. Le titulaire peut payer une personne pour exercer les tâches de l'office à sa place et en faire le commerce en la vendant à un tiers. La vénalité se met en place dès le XIIe siècle et devient officiel à la fin du XVe siècle. Les officiers sont un avantages pour la monarchie, car leurs ventes (même si théoriquement l'office est un don du roi) permet de remplir les caisses, mais aussi un désavantage puisque le roi ne peut pas choisir ses officiers[275].
Les commissaires sont créés pour que le roi ait à sa disposition des agents révocables dont les pouvoirs sont limités par les tâches que lui confère sa lettre de commission[276]. Si le terme de fonctionnaire n’apparaît que dans les années 1770, il recouvre une catégorie d'agents plus anciens : les ingénieurs du roi, les commis (des employés en écritures qui travaillent dans les ministères, les intendances et la Ferme générale) et les inspecteurs (qui ont pour mission de veiller au bon fonctionnement des institutions économiques de l'État). Les fonctionnaires sont révocables et sont rémunérés en fonction d'un grade, ainsi que de l'ancienneté, qui préfigure le statut de la fonction publique moderne[277].
Administration locale[]
Gouverneurs[]
Le gouverneur est le représentant de la personne du roi dans une province ou un pays du royaume. Il doit agir de la même manière que le ferait le roi s'il était présent et obéir aux ordres du monarque. Il est une sorte de vice-roi dans sa circonscription. Sa compétence est néanmoins limitée en matière judiciaire et financière où il ne doit pas usurper le pouvoir des cours souveraines. Il peut par exemple suivre les séances dans le fauteuil du roi ou encore faire part des ordres et intentions du souverain, mais ne pas intervenir dans le déroulement des jugements. En matière financière, il n'a pas le pouvoir de disposer des fonds publics, ni de lever des impositions. La charge de gouverneur n'est pas un office, mais un état. Elle n'est pas vénale et le roi peut révoquer son titulaire selon son gré. Elle peut en outre être conférée à des femmes[278].
La charge apparait au cours du XVe siècle, à la suite de la réorganisation du royaume qui suit la fin de la Guerre de Cent Ans[279]. Au siècle suivant, les gouverneurs exercent souvent de hautes fonctions à la cour et sont souvent absents de leur province. Pour les aider, ils sont adjoints d'un lieutenant général qui exerce les fonctions du titulaire en son absence, ainsi que d'un conseil d’État. Ce dernier est composé d'un état-major, pour l'assister dans ses attributions militaires, puis à partir d'Henri II, des gens de robe longue pour traiter les matières judiciaires, administratives et financières. Le gouverneur emploie des collaborateurs comme un secrétaire chargé de la liaison entre son patron et le roi.
Administrations financières[]
L'administration financière commence à s'étendre en province vers le XVe siècle, issue d'institutions uniques situées à Paris. Au sommet de la hiérarchie se trouve plusieurs cours souveraines comme les chambres des comptes, qui a comme mission de contrôler la comptabilité publique et la conservation du domaine royal, les cours des aides, compétentes en matière de finances extraordinaires et les cours des monnaies (émissions des monnaies et conservation des poids-étalons). En dessous, les bureaux des finances sont créés en 1577 pour faire le lien avec les cours supérieurs et l'administration fiscale locale[280]. En dessous, certains impôts possèdent leurs institutions propres et forment cet échelon local. Ils sont au nombre de trois : les élections qui relèvent les impôts d'ancienne création que sont la taille et les aides, les greniers à sel qui perçoivent la gabelle et les traites qui représentent les droits de douane à l'entrée et à la sortie du royaume où d'une province à une autre[281].
Intendants et subdélégués[]
Les intendants trouvent leurs origines dans les réformes administratives de Henri II pour renforcer le pouvoir royal. Il place alors des superintendants auprès des Gouverneurs dans les provinces conquises ou annexées. L'institution évolue au fil des réformes. Henri IV envoie des intendants pour s'occuper des tâches financières indépendamment des Gouverneurs et nomme des commissaires pour surveiller de l'application des édits dans les provinces, une pratique apparue sous les derniers Valois. Ces derniers récupères le pouvoir de justice sous le règne de Louis XIII. L'épisode de la Journée des Dupes entraine une multiplication des Intendants dans les provinces pour maintenir l'ordre. Puis en 1633, le ministre Pierre Séguier se sert des intendants pour réformer l'administration fiscale. À partir des années 1680, l'intentant devient l'intermédiaire du gouvernement pour contrôler les villes. Au contraire des Gouverneurs qui représentent le roi, les Intendants représentent l'État indépendamment de la personne placée à sa tête[282].
Dans le domaine de la justice, il peut entrer dans les cours supérieures, présider les tribunaux inférieurs et possède son propre tribunal pour juger en dernier ressort les affaires renvoyées par le Conseil. Il reçoit aussi les doléances pour s'informer des abus de l'administration judiciaire. Il exerce la tutelle des villes et des communautés, notamment en matière de gestion financière et d'urbanisme, mais gère aussi les forêts, les voies de communication et tout ce qui relève du bien commun. Ses prérogatives fiscales varient en fonction des pays. Dans les pays d'élections, il veille à la perception de la taille, dans les pays d'états il se contente de communiquer la somme que le roi attend de la province, alors qu'il gère entièrement l'administration dans les pays d'imposition. Il a sous son autorité, le personnel des bureaux répartis en trois catégories : les secrétaires, les commis et les subdélégués[283].
Au vu de l'étendue de la circonscription qu'ils gèrent et avec la multiplication de leurs tâches. Les intendants prirent l'habitude de déléguer des missions à des subdélégués personnels. Le pouvoir central d'abord hostile à la pratique, l'officialise en l'érigeant en office en 1704, tout en gardant le subdélégué sous la dépendance de l'intendant qui doit présenter des candidats au roi. Son ressort géographique est fixé à l'élection dans les pays taillables et à l'évêché ou le bailliage dans les pays d'États. Dans les pays d'imposition, une nouvelle circonscription, la subdélégation, est créée autour des villes. Les subdélégués sont repartis en deux catégories : les subdélégués particuliers et les subdélégués généraux. Les premiers, fournissent des informations à l'intendant, mais ne possèdent pas de pouvoirs décisionnels. Les seconds, coordonnent l'action des bureaux, voir suppléer l'intendant en cas de vacance légitime[284].
Institutions coloniales[]
Les colonies françaises d'Amérique du Nord, ne forment juridiquement qu'une seule entité appelée Nouvelle-France. Celle-ci est divisée en cinq gouvernements : Québec, Trois-Rivières, Montréal, Louisiane et Acadie. L'administration est pratiquement organisée de la même manière que celle de la métropole. Un gouverneur général exerce l'autorité royale sur l'ensemble de la Nouvelle-France. En dessous, le pouvoir est partagé entre un gouverneur (qui possède les pouvoirs militaires) et un intendant ou un commissaire-ordonnateur (qui possède les pouvoirs de justice et de finance). En ville, ils sont représentés par un lieutenant, un major et un aide-major, alors que dans les campagnes leur autorité est relayée par des commandants et des gardes-magasins. La justice est rendue par un conseil souverain, mais les charges ne sont pas vénales contrairement à la métropole, augmentant la soumission des magistrats au pouvoir royal. Au Canada, chaque gouvernement possède un tribunal royal de première instance, laissant la basse justice aux tribunaux seigneuriaux qui finirent par disparaitre au XVIIIe siècle[285].
Institutions sous les Mérovingiens[]
Sous la dynastie mérovingienne, le roi est aidé dans sa fonction par une administration centrale, qui s'exerce au sein du palais, et une administration locale. Le palais désigne un ensemble de services et de charges auprès d'un souverain qui se déplace de résidence en résidence. Parmi ses proches, le roi choisit ses conseillers personnels qui ont souvent une double vocation de domestique et d'administrateur comme le maréchal qui s'occupe des écuries royales et dirige la cavalerie ou le chambrier qui gère la chambre du monarque et réalise des opérations comptables. Certains, comme le comte du palais s'occupe de l'administration judiciaire ou le référendaire qui rédige les actes royaux, n'occupent qu'une fonction publique. La fonction de maire du palais s'accroit au fil des années, à l'origine chargé de superviser la gestion du domaine et des dépenses royales, il devient le personnage le plus important du palais et du gouvernement supplantant même le roi[286].
Pour l'administration territoriale, le roi s'appuie sur une circonscription de l'Empire romain qui a survécu : la civitas (qui devient par la suite le pagus). Il y délègue une partie de sa force publique à un administrateur nommé le comte. Ce dernier est chargé de l'administration, des prérogatives judiciaires et militaires, mais aussi d'encaisser les impôts. Il est assisté de ses subordonnés : les centeniers, aux fonctions plus spécifiquement militaires, et les viguiers, qui sont à la tête d'une circonscription inférieure nommée vicaria et aux fonctions plus tournées vers le judiciaire. Les Évêques peuvent aussi être considérés comme des agents territoriaux qui occupent les fonctions de justice, d'administration et fiscale sur des territoires ecclésiastiques hors d'atteinte des agents du roi par la volonté de ce dernier[287].
Institutions sous les Carolingiens[]
Dans une société marquée par la religion, les Carolingiens s'appuient sur une administration laïque et ecclésiastique. Le palais reste l'administration centrale de la royauté et ses structures restent les mêmes que sous les rois Mérovingiens. Néanmoins, la charge de maire du palais disparaît, ses fonctions sont réparties entre le sénéchal pour l'intendance et le comte du palais pour la justice. Autre évolution, la chancellerie, désormais dirigé par un archichancelier issue de l'Église, recrute ses membres parmi les clercs du royaume[288].
Dans les provinces, le système hiérarchique reste le même, mais un lien de fidélité vassalique entre le monarque et ses agents (surtout les ducs et les marquis) se met en place en échange de terre. Jusqu'au milieu du IXe siècle, des ecclésiastiques, les missi dominici contrôlent et inspectent les agents royaux pour le compte du souverain. La disparition de cette fonction, fait perdre à la monarchie son contrôle sur les agents de terrain qui finiront par échapper au pouvoir central. La justice évolue à l'initiative de Charlemagne, les tribunaux sont désormais composés d'échevins nommés à vie par les missi dominici, qui récupèrent du même coup la présidence en rotation avec les comtes[288].
Institutions sous les restaurations[]
Lorsqu'il arrive sur le trône en 1814, Louis XVIII dote la France d'une Charte qui entérine une partie des acquis de la Révolution, notamment l'égalité des Français, mais réintroduit des concepts d'Ancien Régime. Néanmoins, elle ne pose pas de séparation entre les pouvoirs. Le roi dispose seul du pouvoir exécutif et une partie du pouvoir législatif (il est à l'initiative des lois et les promulgue). Deux chambres sont créées : la Chambre des pairs dont la dignité est héréditaire et la Chambre des députés élue au suffrage censitaire. Elles votent les lois (mais les amendements doivent être consentis par le roi) et peuvent émettre des vœux et des pétitions. La charte précise que les ministres sont responsables, mais ne précise pas si c'est devant le roi ou les chambres[137]. Malgré le vote de lois restreignant les libertés[289] et des tentatives pour revenir à des pratiques d'absolutisme avec Charles X, les institutions ne changeront pas[290].
Les institutions de la Monarchie de Juillet sont relativement semblables à celles du régime précédent. Avec toutefois des changements, les prérogatives du pouvoir législatif sont étendues : le roi ne peut plus légiférer par ordonnances lorsque la sûreté de l'État est en cause et ne peut plus suspendre les lois. Les Chambres ont désormais le pouvoir d'initiative des lois en même temps que le roi. La royauté devient une fonction héréditaire (et plus une dignité), le roi est considéré comme le chef de l'État qui tire son pouvoir de la Nation, représentée par les Chambres. Les ministres doivent posséder la confiance des Chambres et du roi pour se maintenir. L'hérédité de la Chambre des pairs est abolie en 1831[291].
Territoires[]
Le royaume de France est l'ensemble des territoires qui reconnaissent la domination du roi de France, ou sous la période féodale, les territoires des seigneurs qui se reconnaissent vassaux du roi. Jusqu'à la révolution, les frontières sont floues, le roi possède des enclaves extérieures et des souverains étrangers des enclaves intérieures[292]. À l'intérieur, les circonscriptions forment des enchevêtrements homogènes ou hétérogènes selon les natures[293]. La France est divisée en deux, d'une part les pays d'élections assez centralisés et avec des institutions relativement uniformisées et de l'autre les pays d'États et pays d'impositions disposant d'une large autonomie[294]. Les seules circonscriptions avec des limites claires sont celles formées à partir des paroisses, c'est-à-dire les diocèses, les élections et les généralités[295]. Les autres sont plus des listes de localités et de fiefs qu'un territoire linéaire cartographié[296].
Domaine royal[]
Le domaine royal est l'ensemble des fiefs dont le roi est le seigneur direct. Il apparait au XIe siècle avec le morcellement territorial du royaume et va être élargi jusqu'à la fin du Moyen Âge pour se confondre avec les limites du royaume[297]. Les accroissements territoriaux commencent à partir de Philippe II Auguste[298] et se terminent avec l'achat de la Corse en 1768[299] et sa conquête militaire en 1769. À partir du XIIIe siècle, le domaine est inaliénable. Avant ça, les rois n'hésitaient pas à donner des fiefs de la couronne à leur fils puînés pour qu'ils puissent toucher un revenu[300]. Par la suite, sont différenciés le domaine fixe qui appartient à la couronne et le domaine casuel qui est composé des fiefs que le roi acquérait de son vivant (par conquête, succession, héritage) et dont il pouvait disposer dans l'intérêt du royaume[301]. Il est aussi possible au roi de mettre en gage le domaine[302] ou d'échanger des terres contre des biens de même valeur[303].
Principautés et apanages[]
Une principauté territoriale est un État presque souverain, où le prince exerce les pouvoirs législatif, diplomatique judiciaire et fiscal, mais qui reconnaît le roi comme leur suzerain. Elles apparaissent au Xe siècle lorsque les comtes devenus indépendants, réunissent à leur domaine les comtés limitrophes et exercent l'autorité qu'exerçait le roi auparavant[304]. Les principautés déclinent avec la montée en puissance du pouvoir central et vont être progressivement intégrées au domaine royal. Au moment de l'Ancien Régime, elles ont fortement décliné, mais il en reste plusieurs dizaines, le plus souvent de la taille d'une ville[305].
L'apanage consiste à donner un fief du domaine royal à l'un des fils puînés du roi pour qu'il puisse tenir son rang et donne parfois naissance à de nouvelles principautés[300]. Il permet aussi d'associer les princes de sang à la défense du royaume. Avec le temps, la pratique se codifie et à partir du XIVe siècle, les pouvoirs du prince dans son apanage deviennent de plus en plus réduits. Si le prince n'a pas d'héritier mâle, l'apanage doit revenir à la couronne[306].
Circonscriptions administratives[]
Elles sont nombreuses et ne se confondent ni avec les provinces, ni avec les limites des parlements, ni encore avec la géographie féodale[295]. Les bailliages et sénéchaussées sont des circonscriptions anciennes avec des compétences différentes selon leur nature. À l'origine, il s'agit d'un représentant du roi qui a comme mission de rendre la justice, contrôler les prévôts, gérer le domaine, protéger les églises royales, surveiller et transmettre les ordres royaux aux vassaux. Avec le temps, la compétence du bailli va se restreindre au domaine judiciaire, mais des anciennes compétences vont subsister comme la levée du ban[296]. Les Gouvernements sont des circonscriptions contrôlées par un gouverneur qui représente le roi[307]. La Généralité est une circonscription financière administrée par un bureau des finances et par un intendant dans les pays d'élections[307]. Elle est homogène et formée à partir des paroisses avec des contours linéaires[296]. L'Intendance est une circonscription administrée par un intendant. Elle se confond avec la généralité dans les pays d'élections et avec la province dans les pays d'États[307].
Communautés territoriales[]
Seigneuries[]
La seigneurie connait son apogée entre le Xe et le XIIIe siècle. Il s'agit d'un territoire plus ou moins vaste organisé autour d'un château, où le seigneur commande l'ensemble des hommes qui vivent sur les terres. Jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, le royaume est morcelé de seigneuries, aussi bien les campagnes que les villes et elles restent la principale communauté territoriale d'encadrement des hommes et de possessions des terres. Le chef y exerce alors les pouvoirs politique, administratif, judiciaire et militaire. Les hommes vivent sous la protection militaire du seigneur. Ils payent cette protection sous diverses formes d'impôts en fonction de la catégorie sociale, dont le serf est la forme la plus servile[308].
Villes[]
Dans le royaume de France, une ville est d'abord une muraille avec à l'intérieur des groupements d'habitations. Elle est aussi une zone privilégiée honorifique ou fiscale. Elles existent juridiquement sous trois formes différentes : les villes seigneuriales, les villes de bourgeoisie et les villes de communes. Les premières sont administrées directement par le seigneur avec ses officiers. C'est le cas de Paris qui est administrée directement par le roi. Les villes de bourgeoisie sont administrées par les bourgeois par l'intermédiaire d'un groupe de magistrats et d'officiers municipaux. Des villes comme Bordeaux, Toulouse, Marseille ou Lyon sont dirigées de cette façon. Les villes de communes sont administrées par l'ensemble des habitants liés entre eux par un serment autorisé par le roi. C'est le cas de villes comme Beauvais, Bayonne, Angoulême, La Rochelle ou encore Arras. Les statuts des villes sont abolies le 4 août 1789[171].
Provinces[]
Les provinces sont des territoires avec des coutumes, traditions et privilèges communs, ainsi que des organes politiques qui permettent de former une volonté commune. Chaque circonscription administrative est qualifiée province, mais le sens le plus commun sont des communautés reposant sur la tradition des ancêtres. Au XVIIIe siècle, on recense 60 provinces, elles-mêmes subdivisées en pays naturels au nombre d'environ 300. Pour chaque province, le roi doit respecter les coutumes et chartes de droit. Les provinces ont des organes représentatifs comme les parlements, la cour souveraine, la Chambre des comptes, ou encore le Conseil souverain, mais surtout les États provinciaux qui sont un contre-pouvoir au roi pour protéger les sujets[172].
Villages[]
Les villages du royaume de France sont des communautés d'habitants qui s'administrent eux-mêmes, sans avoir besoin de l'autorisation du roi pour être reconnu légalement. Les villageois s'organisent en assemblée qui a lieu plusieurs fois par an. Pour prendre des décisions, au moins dix habitants doivent être présents, mais pour décider d'un emprunt ou aliéner un bien commun la présence de tout le monde est nécessaire. L'organisation de l'assemblée dépend des provinces et coutumes, mais très souvent le vote a lieu à haute voix et est présidé par un syndic élu pour un an par acclamation. Les communautés villageoises ont le pouvoir de police local (rédaction des règlements de la police rurale) et économique (comme l'entretien et la construction des biens communs). Elles s'occupent en grande partie de l'administration royale locale[170].
Paroisses[]
La paroisse est la subdivision de base d'un diocèse de l'Église catholique. Le réseau paroissial de la France se forme aux XIIe siècle et XIIIe siècle lié à la forte augmentation démographique qui peuple les campagnes et les villes. La carte des paroisses n'évolue presque pas jusqu'à la révolution qui les transforme en commune[309]. La paroisse est dirigée par une assemblée paroissiale, qui comprend souvent les mêmes personnes que celle des communautés villageoises et urbaines. Le chef de la paroisse est le curé, parfois élu par les paroissiens, qui lui doivent le logis et la dîme. L'assemblée administre les biens et revenus de la paroisse à travers le conseil de fabrique. Pour cela, elle élit pour un ou plusieurs marguilliers pour la durée d'un an. L'assemblée paroissiale est souvent propriétaire des biens affectés aux pauvres et contrôle l'administration du bureau de charité chargé de la distribution[310].
Symboles[]
Les armoiries du royaume apparaissent vers 1180. Elles sont dites « d'azur semé de fleurs de lis d'or », le bleu est la couleur de la dynastie des Capétiens et la fleur de lys symbolise la fonction royale[311] depuis que, selon la légende, elles aurait été envoyées du ciel à Clovis Ier[312]. Progressivement, le semé est remplacé par trois fleurs de lys qui symbolise la Trinité et c'est sous Charles V le Sage que la modification est entérinée[313]. Sous le royaume de France, les armoiries sont utilisées par l'ensemble des habitants, mais aussi par des corps ou des personnes morales comme marque de propriété[314]. En juin 1790, les armoiries sont supprimées par les révolutionnaires dans tout le royaume[311].
Durant l'Ancien Régime, le royaume n'a pas de drapeau officiel, mais le drapeau blanc est utilisé comme le symbole du pouvoir régalien militaire, souvent parsemé de fleur de lys ou des armoiries royales[315]. À partir de 1790, le drapeau rouge, blanc et bleu, devenue les couleurs de la nation française, devient le drapeau officiel du royaume pour les bâtiments maritimes, puis pour les unités militaires[316]. Avec la Restauration, le drapeau blanc uni devient le symbole du royaume, non sans contestation puisque le blanc est devenu la couleur de la reddition. La monarchie de Juillet instaure définitivement le drapeau tricolore bleu, blanc et rouge comme drapeau du royaume[140].
Il n'y a pas de devise nationale pour le royaume, chaque roi a sa propre devise. Ce qui peut se rapprocher le plus d'une devise nationale est le cri de guerre des chevaliers français « Montjoie Saint-Denis ! », mais il tombe en désuétude à l'époque moderne[317]. Durant les monarchies constitutionnelles, plusieurs devises sont écrites sur les documents officiels qui font référence soit au roi, à la loi, à la nation, à la liberté, ou encore à la justice[318]. Il n'y a pas d'hymne national, ni même royal. À partir du XVIIe siècle, deux chansons se détachent et deviennent nationales Vive Henri IV ! et Charmante Gabrielle. Elles sont remises à l'honneur lors de la Restauration, considérées comme des chants à la gloire de la dynastie royale, mais jamais elles ne deviennent officielles[319].
Notes et références[]
Notes[]
Références[]
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Annexes[]
Bibliographie[]
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- La France de la Révolution et de l'Empire, Puf, 2007, 211 p. (ISBN 978-2-13-054191-2).
- Les Institutions de la France médiévale : XIe-XVe siècle, Armand Colin, 2009, 207 p. (ISBN 978-2-200-35429-9).
- La France médiévale : institutions et société, Armand Colin, 2010, 426 p. (ISBN 978-2-200-25468-1).
- La France au Moyen Âge : du V au XVe siècle, Puf, 2012, 567 p. (ISBN 978-2-13-058230-4).
- Les Institutions de la Monarchie française à l'époque moderne, Puf, 2012, 430 p. (ISBN 978-2-13-060678-9).
- Dictionnaire de l'Ancien Régime, Puf, 2013, 1384 p. (ISBN 978-2-13-058422-3).
- Histoire de l'Amérique française, Flammarion, 2014, 863 p. (ISBN 978-2-0813-3675-9).
- La France au XIXe siècle, Puf, 2014, 656 p. (ISBN 978-2-13-063257-3).
Articles connexes[]
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